La Victoire de l’Amour !
On peut dire que Jésus l’a échappé bel ce jour-là. La fureur des gens de la synagogue a failli avoir raison de lui. « Mais lui, passant au milieu d’eux, allait son chemin. »
On peut se demander comment il se fait que les gens se soient laissé emporter comme ça par la colère, jusqu’à menacer Jésus et vouloir le faire périr? Qu’est-ce qui a bien pu se passer pour provoquer un tel revirement, une telle agressivité chez eux. Ils étaient d’abord tellement sympathiques à Jésus et fiers de l’accueillir au village et dans la synagogue? Enfin comment Jésus a-t-il pu leur échapper aussi facilement, sans blessure ni dommage, comme par enchantement?
Commençons par la volte-face des gens de Nazareth. Jésus vient de lire le prophète Isaïe : « L’Esprit du Seigneur est sur moi, il m’a consacré par l’onction pour annoncer la Bonne nouvelle aux pauvres », et il affirme d’emblée une chose inouïe, à savoir que c’est lui qui réalise en sa personne cette parole du Seigneur. Ça, les gens de Nazareth n’arrivent pas à le croire. Ce n’est pas possible! D’où leur doute et leur méfiance à l’égard de Jésus. Dans ces conditions Jésus ne peut pas produire de guérison en leur faveur. La foi n’est pas au rendez-vous. On comprend la frustration des juifs à entendre dire; « Aucun prophète ne trouve un accueil dans son pays. » Or, Jésus en rajoute, en leur disant : les païens font mieux que vous pour accueillir l’œuvre de Dieu. Rappelez-vous la veuve de Sarepta, au temps du prophète Élie; rappelez-vous le général syrien Naaman, au temps d’Élisée. La foi a sauvé ces pauvres de leur misère. Vous, votre manque de foi va vous perdre! De tels propos ne pouvaient que piquer à vif les gens de son village. Ils s’emportent contre Jésus qui s’échappe mystérieusement. Quelqu’un l’aurait-il protégé? Quelqu’un l’a-t-il sauvé?
En fait, nous avons dans cet épisode, au tout début de l’Évangile de S. Luc, en raccourci, tout le parcours de Jésus et peut-être aussi le nôtre. Le drame déjà s’annonce où nous verrons le Seigneur, mal accueilli chez les siens, être mis à mort sur la croix. Or, Dieu, son Père, ne pouvait laisser son fils prisonnier du tombeau. Dieu n’abandonne pas son prophète. Rappelons-nous les mots de Jérémie dans la 1ère lecture : « Ils te combattront, mais ils ne pourront rien contre toi, car je suis avec toi pour te délivrer. »
Après les événements de Pâques, l’Église du Christ prend la relève. Elle connaît le sort de son Seigneur. Car elle est – comme lui – en mission au milieu du monde, confrontée comme Jésus, persécutée, martyrisée et, elle aussi, elle est délivrée sans cesse par le Père. Le mystère de la passion, de la mort et de la résurrection du Christ s’accomplit en elle. L’Église comme Jésus, porte une mission d’amour et de paix, menée sous la poussée de l’Esprit; mais c’est dans la fragilité qu’elle assume ce service. Elle est appelée comme Jésus à poursuivre sa route par des chemins d’humilité auprès des pauvres, des prisonniers, des aveugles, des boiteux, des pécheurs.
Cette Église, c’est nous aujourd’hui. Rappelons-nous les termes de l’oracle du prophète Isaïe. Notre mission est encore et toujours auprès des pauvres et des petits; elle consiste à poser des gestes concrets de compassion, de guérison, de libération, dans la force d’un amour qui nous est donné.
- Paul dans son hymne à la charité nous rappelait les composantes de cet amour. C’est la richesse de l’amour de Dieu devenu le nôtre! Car le don le plus grand que Dieu nous fait, c’est celui d’aimer comme lui, comme son fils nous a aimés. Cet amour, il risque de n’être pas compris, de n’être pas aimé en retour. Confiance! il ne passera jamais.