Selon Stéphane Bonnevault dans son ouvrage Développement insoutenable (2003), « la culture est un système de symboles signifiants », c’est-à-dire pour résumer un peu brutalement, un ensemble d’informations qui veulent dire quelque chose pour les personnes qui partagent cette culture. Ce que nous partageons alors s’exprime à travers le langage, l’art, les rituels et les mythes. Chaque communauté de personnes aussi large soit-elle compose donc une culture commune qui se tisse au fil des histoires partagées. Ces histoires sont des récits où tous, se reconnaissent, soit comme témoin lorsque le récit raconte du vécu ensemble, soit comme spectateur quand il raconte une fiction que tous veulent écouter ensemble. La communauté se rassemble dans des histoires qui se doivent d’être racontées de multiples fois pendant lesquelles se tissent entre tous un lien, un fil de trame au rythme de la trame du récit. Raconter, c’est dire, c’est se dire, c’est se réunir.
La foi partagée se consolide lors des récits de l’Evangile où les croyants écoutent et se projettent comme partie prenante de l’annonce de la Bonne Nouvelle. Dans la famille croyante, se prolonge alors au sein de la culture familiale qui lui est propre le tissage de la foi au fil des travaux et des jours.
Mais dans la famille où la foi se délite, quand les enfants grandissent et découvrent de nouveaux horizons et de nouveaux récits, le rituel du partage cesse d’être coutume ; le récit n’est plus déclamé faute d’auditeurs. Le partage se restreint alors aux ilots étriqués de la foi rémanente. Vient alors non plus le partage des déclamations communes mais le chuchotement irrégulier et dispersé de la Parole au sein de la communauté familiale qui a cessé d’en faire un élément essentiel de sa culture.
Pour le petit reste, vient le temps des semailles intérieures. Ce n’est plus le temps du « geste auguste du semeur » de Victor Hugo mais bien le temps aride de l’espérance hivernale quand il faut croire au grain qui dort.
Toutefois puisque le Dieu que nous confessons est l’Amour, puisque ce Jésus qui a fréquenté la place de nos villages est l’Amour incarné, qu’importe la récolte pourvu qu’on s’aime.