« N’enlevez pas l’ivraie! »
« En enlevant l’ivraie, vous risquez d’arracher le blé en même temps. Laissez-les pousser ensemble jusqu’à la moisson. » Ce n’est pas toujours ce que nous aurions envie de faire, tellement nous aimons les choses nettes et pures, bien ordonnées et sans mélange. Pourtant le Seigneur nous invite à la nuance, à la tolérance, à beaucoup de patience.
Toutes les lectures sont brèves ce matin, comme pour nous aider à pointer le message essentiel et suffisant pour ce dimanche : Dieu n’est pas pressé. Il ne veut pas tout faire en même temps. Il prend le temps. Il nous donne du temps. Il nous dit comment prendre les choses dans la vie, quand tout ne va pas selon nos goûts, nos attentes, nos principes. Il nous dit d’accepter que tout ne soit pas parfait ici-bas. À nous qui voudrions intervenir d’emblée et d’autorité, et changer tout de suite le cours des choses, il dit : Attention! N’allez pas trop vite. Vous risqueriez de faire plus de mal que de bien. Vous risqueriez de blesser quelqu’un, de vous tromper.
Cette parabole nous dit encore une fois les mœurs de Dieu et elle nous dit comment faire pour lui ressembler, pour être vraiment des disciples, les enfants du Royaume.
Bien sûr, Dieu pourrait intervenir avec puissance. Redresser à mesure tous les torts, éliminer toute résistance. Il a choisi pour un temps de laisser faire, de se laisser faire. Et il nous prie de faire de même. Voilà la Bonne Nouvelle d’aujourd’hui. Surprenante! Étonnante! Réconfortante!
En cette parabole, Jésus nous explique la situation. Il nous rappelle d’abord que Dieu est un semeur, qu’il a semé du bon grain dans son champ. C’est dire qu’il a confiance en son œuvre. Il lui donne du temps. Il a la patience du semeur, de l’agriculteur. Or, c’est un fait qu’il y a de la mauvaise herbe qui pousse dans le champ. C’est triste! C’est embarrassant! Ce n’est ni voulu ni souhaité par le Seigneur. Devant cette réalité du mal, gardons-nous de paniquer ou de réagir de façon impulsive. Il faut résister à l’envie de tout corriger à mesure. Ce serait là un jeu dangereux. Qui risquerait de nuire à la saine croissance du blé. Dieu s’en abstient.
Chaque chose en son temps. Viendra à la fin le temps du discernement, du jugement, de la sélection définitive de la bonne récolte, à l’exclusion pure et simple de ce qui n’est pas bon. Mais pour l’instant, il faut nous accommoder d’une certaine imperfection, d’une présence même indésirable.
Avouons que dans notre vie personnelle nous souffrons de cette impatience, celle de ceux qui voudraient tout de suite que nous soyons parfaits eux-mêmes. La compétition entre nous nous y pousse. Nous n’acceptons pas d’imperfection en nous et chez les autres. Le Seigneur nous dit aujourd’hui d’être patients et tolérants. Non pas de prendre le parti du mal et de la médiocrité, mais d’avoir assez d’égard pour le bien en chacun, chacune de nous pour le protéger jusqu’à accepter de le promouvoir de la plus délicate et positive façon possible.
C’est pareil dans l’Église et dans la grande société. Nous avons fait beaucoup de tort parfois en étant radicaux, intolérants, puristes à l’extrême, impatients de réaliser une société pur-sang, parfaite, une sorte de ghetto. Le Seigneur nous demande d’être sages et capables d’attendre comme lui, laissant le bon grain de lui-même faire ses preuves. Faisons-lui confiance, nous aussi. Donnons une chance à l’Esprit Saint de travailler le monde et de lui faire produire tout le bon fruit attendu.