Je me permets de vous raconter ce que j’ai observé récemment dans ma famille et qui m’apporte beaucoup de confiance et de réconfort avec un vif sentiment de fierté. Les gestes rapportés ici ne sont pas sans m’inviter à nous questionner sur nos façons de réagir face aux conditions difficiles vécues par plusieurs de nos semblables.
Mon petit frère (âgé de 66 ans) a dû subir récemment une chirurgie cardiaque majeure. C’était une longue histoire de valve cardiaque défectueuse et de conduits sanguins fragilisés à proximité du cœur. La chirurgie fut tout à fait bien réussie par les spécialistes. Or, en plus de constater la compétence et l’impressionnante couverture de soins assurés par le personnel de l’hôpital, j’ai vu trois de mes sœurs se relayer constamment auprès de mon frère pour l’accompagner, veiller sur lui, l’entourer d’affection et d’une attention toujours patiente et bienveillante. Pour les semaines de sa convalescence hors de l’hôpital mon frère, lui-même célibataire, a pu compter sur ces trois femmes. Elles se sont rendues disponibles pour le prendre chez elles à la maison pendant une semaine chacune. Leurs maris n’ont pas été en reste; ils étaient bien d’accord eux aussi pour assurer à mon frère le confort voulu et l’assistance dont il avait besoin. Je dis « Chapeau ! » à mes petites sœurs et à leurs conjoints. Bravo pour la merveilleuse tendresse qu’ils ont prodiguée à un homme dont la condition de santé était fort délicate et particulièrement demandante.
Mon travail de curé de paroisse m’a placé souvent dans des situations extrêmes d’accompagnement de grands malades assistés par leurs proches. Je ne vois pas tout, mais je remarque chez tellement de gens les plus belles attitudes d’humanité, de fidélité et de dévouement. Je trouve dans des témoignages qui ne sauraient mentir la certitude que l’être humain lorsqu’il est dans les plus grandes fragilités et le pire des malheurs peut normalement compter sur les siens.
Tout ça me donne de l’espérance et me fait signe. Il y a chez les humains de bien belles et abondantes ressources d’amour et de générosité. De la compassion à revendre. Une âme de héros. Des capacités infinies de don de soi.
Dommage que pour des raisons politiques ou idéologiques, à cause de consignes religieuses aberrantes ou de pressions sociales de clans et d’ethnies, on en arrive à durcir les manières entre nous et à freiner toute compassion et toute générosité ! Un penchant égoïste, le refuge dans une bulle intellectuelle, esthétique, artistique, sociologique, voire l’observance d’un tabou religieux, tout peut contraindre quelqu’un à s’éloigner du service au prochain. Pourquoi faut-il que ces facteurs et sans doute bien d’autres viennent tarir chez nous la source de la tendresse et de l’affection, pourtant si naturellement humaine, et pourquoi viennent-ils bloquer le train de nos capacités qui pourraient porter efficacement secours à tout être humain en détresse ?
Jacques Marcotte, O.P.
Saint-Dominique de Québec