La scène se passe en Palestine, sur les bords du Jourdain. Jean Baptiste prêche dans la région. Des gens l’accompagnent. Ils sont devenus des disciples. Parmi eux, un certain André, le frère de Simon. (Cf. Jean 1, 35-42)
Jésus n’est pas loin. Jean Baptiste le reconnaît. Il le pointe du doigt en disant: « Voici l’Agneau de Dieu.» L’Agneau: qu’est-ce à dire? L’image fait penser à Pâques, la fête qui commémore la libération du peuple hébreu. Et que l’on célèbre en offrant un agneau en sacrifice de reconnaissance.
André et un autre compagnon du Baptiste ont entendu le prophète. Ils laissent tout et suivent Jésus. Celui-ci se retourne et demande: « Que cherchez-vous?»
Question banale? Simple entrée en matière? Oh, que non ! La question est fondamentale. C’est la question de toute vie humaine. Celle qui nous fait penser, qui nous fait agir, qui guide nos décisions, qui occupe nos rêves. Que cherchez-vous? Quel est votre désir le plus profond? Qu’est-ce qui vous tenaille au plus intime de vous-mêmes? Qu’est-ce qui pourrait vous révéler le véritable sens de votre vie? Que cherchez-vous?
La réponse des disciples est elle-même une question: « Maître, où demeures-tu?» Où est-ce que tu te situes? Quelle est ta véritable identité? Nous voulons le savoir pour saisir notre propre identité, le vrai sens de notre propre vie.
« Maître, où demeures-tu?» Jésus ne donne pas une adresse. Il dit plutôt: « Venez, et vous verrez.» Mettez-vous en route. Cherchez en me suivant, en me prenant pour guide. Et trouvez par vous-mêmes, à la lumière de ma présence. Cherchez-moi et trouvez-vous! Dans ces quelques mots se résume l’expérience spirituelle proposée par les évangiles: cherchez-moi et trouvez-vous!
Quand André rencontre Pierre le lendemain, il lui dit: « Nous avons trouvé le Messie.» Celui que tout le peuple attend, celui que les humains cherchent depuis des millénaires, nous l’avons trouvé et, du même coup, peut-être sommes-nous en train de nous trouver nous-mêmes.
La rencontre du Christ, l’acte de foi ou la vocation, c’est essentiellement la rencontre de soi-même dans la rencontre du Christ. Un jour, nous avons reçu la Parole de Dieu. C’était peut-être au cours d’une messe, ou dans une catéchèse, ou dans le témoignage d’un croyant ou d’une croyante, ou au cours d’une découverte exceptionnelle, peut-être lors d’une maladie ou une souffrance que nous avons vécue.
Ce jour-là, la Parole de Dieu a résonné en nous. Elle a fissuré nos fausses identités pour dévoiler notre véritable moi. Elle a fait craquer les fausses valeurs de notre existence pour amener au grand jour le sens profond de notre être. Alors, nous avons dit: « Me voici!» comme Abraham, comme Jacob, comme Samuel, comme Ésaïe, comme Marie: « Me voici!» Je n’étais pas là encore; maintenant, me voici.
Depuis cette expérience initiale, nous sommes encore des croyants. Il arrive à notre foi de traverser des nuits opaques, de subir la tentation de tout lâcher. Jusqu’à date, nous tenons bon. Nous continuons de dire : « Me voici!» Et nous devons notre persévérance à tous ces « Me voici!» qui parsèment notre existence, tous ces « Me voici!» que nous prononçons à voix haute ou dans le murmure intime de notre coeur. Tous ces « Me voici!» qui se récapitulent dans le Christ quand il dit à son tour : « Me voici!» sur la croix du vendredi saint jusqu’au jardin du dimanche de Pâques.