Pierre Chrysologue, de son vrai nom Pierre de Ravenne, devint évêque de la cité impériale entre 424 et 429. La qualité de sa prédication lui valut le surnom de Chrysologue, « Bouche d’or ». Son enseignement demeure toujours d’une grande simplicité, sinon d’une profondeur théologique remarquable. Le saint évêque avait comme principe qu’il « il faut parler au peuple, dans la langue du peuple ». Dans ses sermons inspirés par les grandes fêtes chrétiennes, on le sent préoccupé du désir de l’homme de voir Dieu. Pour lui, l’incarnation du Fils de Dieu avait pour but la divinisation de l’homme. C’est son amour pour nous qui a conduit le Christ à sa passion. Pierre a beaucoup prêché sur la foi, la vie chrétienne et l’Eucharistie. Il fut somme toute un excellent commentateur de la parole divine. Il mourut avant 451. Ce court extrait d’un de ses sermons sur l’Incarnation pourrait être de nature à nous redonner élan et confiance en cette fête du travail, notre victoire quotidienne sur tout ce qui nous permet de vivre notre existence humaine.
La naissance du Christ ne s’est pas faite par nécessité, mais par puissance. Elle fut mystère de foi renouvellement et salut pour l’homme. Celui qui sans être né, a fait l’homme avec du limon intact, en naissant as fait l’homme à partir d’un corps intact ; la main qui a daigné saisir l’argile pour nous créer a daigné saisir aussi notre chair pour nous recréer. Que le Créateur se trouve dans sa créature, que Dieu se trouve dans la chair, cela honore la créature, sans outrager le Créateur.
Homme, pourquoi te méprises-tu tellement, alors que tu es si précieux pour Dieu ? Pourquoi, lorsque Dieu t’honore ainsi, te déshonores-tu à ce point. ? Pourquoi cherches-tu comment tu as été fait et ne recherches-tu pas en vue de quoi tu as été fait ? Est-ce que toute cette demeure du monde que tu vois n’a pas été faite pour toi ? C’est pour toi que la lumière se répand et dissipe les ténèbres, c’est pour toi que la nuit est réglée, pour toi que le jour est mesuré ; pour toi que le ciel rayonne des splendeurs diverses du soleil, de la lune et des étoiles ; pour toi que la terre est émaillée de fleurs, d’arbres et de fruits ; pour toi que cette foule étonnante d’animaux a été créée, dans l’air, dans les champs, dans l’eau si belle, pour qu’une lugubre solitude ne gâte pas la joie du monde nouveau.
En outre, le Créateur cherche ce qu’il peut bien ajouter à ta dignité : il dépose en toi son image, afin que cette image visible rendre présent sur terre le Créateur invisible, et il te confie la gérance des bien terrestres, afin qu’un aussi vaste domaine n’échappe pas au représentant du Seigneur.
Dieu a réalisé en lui ce que lui-même avait fait en toi, et il a voulu se voir vraiment présent dans l’homme chez qui il avait voulu qu’on le voie auparavant comme dans une image ; il a voulu être lui-même directement ce qu’il avait accepté auparavant d’être par une simple ressemblance.
Le Christ naît donc pour rendre par là toute son intégrité à la nature corrompue ; il endosse la condition d’enfant, il accepte d’être nourri, il a traversé des âges successifs afin de restaurer l’âge unique, parfait et durable qu’il avait lui-même créé. Il porte l’homme pour que l’homme ne puisse plus tomber ; celui qu.il avait créé terrestre, il le rend céleste ; celui qui était animé par un esprit humain, il lui donne la vie d’un esprit divin. Et c’est ainsi qu’il l’élève tout entier jusqu’à Dieu, afin de ne rien laisser en lui de ce qui appartient au péché, à la mort, au labeur, à la douleur.à la terre. Voilà ce que nous apporte notre Seigneur Jésus Christ, qui, étant Dieu, vit et règne avec le Père, dans l’unité du Saint-Esprit, maintenant et toujours, et pour les éternels siècles des siècles.