J’emprunte ce titre à un recueil de poèmes en prose de Paul Claudel. Un paroissien assis au dernier banc de la nef médite sur ce qui se passe là-bas, loin de lui, là où s’agite un vieux monsieur paré de dentelles et qui parle de choses étranges.
J’inversais les rôles un certain samedi soir quand, depuis l’autel, j’observais ce qui se passait devant moi, D’abord quelques pas tremblants et claudicants, toussotements discrets, cantiques à la voix mal assurée. Deux dizaines de « fidèles » de mon âge au Gloria, une autre dizaine à l’évangile. Puis, peu à peu, mais au compte-gouttes, une nef assez bien garnie, même de jeunes et d’enfants. Tous présents pour s’entendre dire : « Allez dans la paix du Christ ! » Me revint en mémoire le fameux quatrain de notre vieux Corneille : Nous partîmes cinq cents/ mais pas un prompt renfort/ nous nous trouvâmes trois mille/ en arrivant au port.
Je n’ai rien du Cid Campeador. Je rentrai donc chez moi, toute messe dite, non pas victorieux des infidèles, mais tout de même heureux et soulagé, puisque chacune et chacune reçut finalement sa part de messe. Même les ouvriers et ouvrières de la onzième heure, dont une célèbre parabole nous dit qu’ils sont payés autant que les travailleurs de l’aube.
N’en déplaise aux liturgistes formalistes, je me dis que les dons de Dieu sont comme les mots du Larousse. Ils sont semés à tout vent. Pas forcément sur un terreau bien préparé. Chacun les reçoit selon sa contenance et sa convenance. D’où mon étonnement joyeux et reconnaissant de glaner tant « mots divins » sur des lèvres malhabiles à parler la langue de ma tribu.
Dieu passe les frontières de nos Eglises et de nos religions. C’est certain. Il est trop riche pour être contenu dans une seule page de catéchisme. Sa Parole prend source dans tous les « cœurs purs ». Y compris dans ceux qui n’ont qu’un brin de messe pour et l’accueillir.