Du commencement à la fin
Que la grâce et la paix vous soient données, de la part de Jésus Christ, le témoin fidèle, le premier-né d’entre les morts, le souverain des rois de la terre.
A lui qui nous aime, qui nous a délivrés de nos péchés par son sang, qui a fait de nous le royaume et les prêtres de Dieu son Père, à lui gloire et puissance pour les siècles des siècles. Amen.
Voici qu’il vient parmi les nuées, et tous les hommes le verront, même ceux qui l’ont transpercé ; et, en le voyant, toutes les tribus de la terre se lamenteront.
Oui, vraiment ! Amen ! Je suis l’alpha et l’oméga, dit le Seigneur Dieu, je suis celui qui est, qui était et qui vient, le Tout-Puissant.
COMMENTAIRE
En cette fête du Christ, Roi de l’univers, nous avons le début d’une lettre d’un certain Jean aux sept églises d’Asie, tiré du livre de l’Apocalypse, i.e. de la Révélation. Ce livre est un ouvrage complexe et étonnant. Écrit en un temps de persécution, dans les années 90, il veut encourager les communautés de la région d’Éphèse. Il comprend beaucoup d’allusions directes et indirectes aux Écritures de la première Alliance, particulièrement les Prophètes et les Psaumes, mais aussi la Genèse et l’Exode. Et il se promène dans un monde de symboles qui ne sont pas toujours évidents pour des lecteurs actuels.
Mais ce début de l’ouvrage est plus accessible. Il contient une salutation et une prière. Il nous plonge dans une ambiance liturgique, avec son langage, ses formules (Amen!), son hymne. Ce qu’il nous offre avant tout, et cela est plein de sens pour la fête célébrée, c’est une proclamation enthousiaste du Christ et une riche réflexion sur son mystère. Ainsi, il invite à un regard contemplatif sur la présence, toujours actuelle, de Jésus le Vivant.
À Jésus Christ, trois titres sont d’abord donnés : témoin, premier-né, et souverain. Le témoin est celui qui donne sa vie jusqu’au bout; c’est le martyr. Le premier-né est celui qui, par sa résurrection, nous ouvre le chemin de la vie. Le souverain est celui qui règne sur l’univers, à la droite du Père. Ainsi, les trois composantes du mystère pascal sont évoqués : la mort sur la croix, la résurrection et l’exaltation de Jésus.
Le Christ est aussi présenté dans son agir et dans ses traits. L’essentiel est dit : il nous aime. Sa Pâque est un acte de libération, un nouvel exode, qui nous constitue comme peuple de Dieu, lui rendant un culte. La gloire et la puissance, qui appartiennent au Dieu créateur et sauveur dans les Écritures, lui sont attribuées.
Mais le Christ n’est pas présenté seulement dans son événement historique et sa présence actuelle. Il est aussi celui qui vient pour inaugurer la création nouvelle. Il était, il est et il vient. Le temps et l’espace, le ciel et la terre, les êtres crées, tous sont convoqués dans cet avènement universel. Tous les hommes, toutes les tribus, du passé à l’avenir, sont impliqués. Il est le commencement et la fin, le premier et le dernier, comme l’auteur le redira à la fin du Livre.
Il est le Pantocrator, le Tout-Puissant, celui que les icônes présentent dans sa souveraine grandeur, sur son trône de gloire. Et pourquoi est-il ainsi régnant? Parce qu’il a dominé et écrasé, parce qu’il est le plus fort? Non! Mais parce qu’il a aimé et servi jusqu’au bout. Par la faiblesse de la croix et la folie du don. Ainsi est-il par excellence le témoin fidèle du visage créateur et re-créateur du Dieu vivant, le témoin de la vérité qui rend libre.
Drôle de roi! Son Royaume est différent de ceux de notre monde. Heureusement. Parce qu’il peut justement nous rendre heureux.
En quelques phrases, dans un climat liturgique, c’est une véritable christologie que nous offre ce Jean, pour nourrir notre contemplation et notre réflexion. Et nous inviter à dire à notre tour : Amen!