Nous venons de terminer une année en portant bien des préoccupations. Un mot a souvent circulé dans nos conversations au cours des derniers mois, et même des dernières années: nous avons beaucoup parlé de crise. Crise économique, crise financière, crise des institutions sociales, crise des générations, crise des valeurs, crise spirituelle. On a souvent mis sous le mot «crise» des réalités qui appartiennent tout simplement à l’évolution des choses, leur développement comme leurs inévitables régressions.
Tout change. Et c’est tant mieux. C’est le propre de la vie de changer. Imaginez-vous à l’âge de deux ans, qu’on décrète que vous ne devez pas changer! Ce serait la mort à brève échéance. Regardez-vous à 30, 50 ou 80 ans: pourquoi ne pourriez-vous pas continuer d’évoluer? De vivre des changements qui vous rendent plus vivants?
C’est dans cet esprit que nous nous offrons des voeux à l’occasion de Noël et du Nouvel An. Nous nous souhaitons de la paix, de la joie, de l’amour, du bonheur. Des cadeaux précieux qui nous feront grandir. Non seulement ils nous garderont en vie mais encore ils accroîtront notre vitalité, notre dynamisme.
Que pourrions-nous souhaiter de meilleur aux québécois et aux québécoises que nous sommes? Quel voeu mériterait de se réaliser pour notre plus grand bien? Pas facile de faire un choix, s’il faut en faire un. Parmi les biens les plus importants, souhaitons-nous du respect. Que l’on nous respecte comme personne et que nous ayons nous-mêmes du respect pour les autres. Que le respect devienne la caractéristique de notre agir collectif.
Dans la mentalité actuelle, ce que d’aucuns appellent une culture, nous accordons le primat à l’individu, à ses droits, à ses désirs. Nous mettons tout en oeuvre pour protéger notre intimité. Nous faisons tout pour que les quelques pièces que nous habitons deviennent un petit paradis à l’abri des influences étrangères. Au point que certains n’ont pour tout contact extérieur que des réalités virtuelles ou ce que transmettent les médias.
Nous risquons, dans un tel contexte, d’oublier que les droits des uns ne peuvent ignorer les droits des autres. Que la collectivité, la société, a elle aussi des droits. Que le bien commun est tout aussi important que le bien individuel.
Donc du respect. Souhaitons-nous du respect. D’abord du respect pour la vie. La science fait des bonds prodigieux, notamment dans l’univers de la biologie et de la médecine. Nous avons vaincu des maladies et nous viendrons à bout d’autres situations semblables. Les découvertes des dernières années nous laissent deviner l’ampleur des champs de recherche dans ce domaine. Nous souhaiter du respect, c’est espérer que la personne humaine ne soit pas oubliée dans tout ce travail scientifique. Que les manipulations génétiques respectent la nature. Nous pouvons transformer la matière. Nous pouvons améliorer les conditions de vie. Mais, quand il s’agit de la vie humaine, nous manipulons un corps physique doué d’esprit. Une âme anime ce corps. Une intelligence le réfléchit. Une volonté le met en action. Ce corps est tout autant spirituel que son esprit est corporel. Le respect de la vie, c’est d’abord cette vive conscience que nous ne sommes pas les propriétaires et les maîtres de la vie!
Souhaitons-nous du respect dans nos relations sociales. Que de fois nous nous comportons en égocentriques, préoccupés uniquement des nos intérêts individuels. Chacun tire la couverture de son côté! Que les personnes soient respectées lorsqu’elles font appel aux services publics. Parfois nous nous plaignons le ventre plein. Nous faisons la grève pour améliorer un sort déjà enviable et souvent envié par les vraies victimes de ces grèves.
Souhaitons-nous aussi du respect dans nos institutions politiques. A-t-on le droit de gérer la chose publique comme une simple entreprise commerciale? L’administration d’un pays ou d’une portion d’un pays peut-elle se concentrer sur sa dimension économique en ignorant le reste? Peut-on se contenter de gouverner par des luttes de partis ou des revendications de pouvoir? Une sérieuse réflexion est à faire de ce côté par respect pour les citoyens et les citoyennes qui forment notre peuple.
Au début d’une nouvelle année, nous souhaiter du respect, c’est attendre beaucoup. Peut-être trop. Mais il y a en nous suffisamment de ressources et d’aspirations pour espérer que notre évolution aille en ce sens.