Devenir pasteur et porte
Jésus parlait ainsi aux pharisiens: “Amen, amen, je vous le dis: celui qui entre dans la bergerie sans passer par la porte, mais qui escalade par un autre endroit, celui-là est un voleur et un bandit. Celui qui entre par la porte, c’est lui le pasteur, le berger des brebis. Le portier lui ouvre, et les brebis écoutent sa voix. Ses brebis à lui, il les appelle chacune par son nom, et il les fait sortir. Quand il a conduit dehors toutes ses brebis, il marche à leur tête, et elles le suivent, car elles connaissent sa voix. Jamais elles ne suivront un inconnu, elles s’enfuiront loin de lui, car elles ne reconnaissent pas la voix des inconnus. »
Jésus employa cette parabole en s’adressant aux pharisiens, mais ils ne comprirent pas ce qu’il voulait leur dire. C’est pourquoi Jésus reprit la parole : « Amen, amen, je vous le dis : je suis la porte des brebis. Ceux qui sont intervenus avant moi sont tous des voleurs et des bandits ; mais les brebis ne les ont pas écoutés. Moi, je suis la porte. Si quelqu’un entre en passant par moi, il sera sauvé ; il pourra aller et venir, et il trouvera un pâturage. Le voleur ne vient que pour voler, égorger et détruire. Moi je suis venu pour que les hommes aient la vie, pour qu’ils l’aient en abondance.
Commentaire :
Jésus propose aux pharisiens une parole énigmatique. Cette parabole parle de Jésus lui-même, de qui il est, mais dans sa relation à nous, et dans notre relation à lui, aujourd’hui, le Christ vivant. Deux images, emmêlées mais différentes, sont utilisées pour donner accès au mystère de Jésus, pour en faire saisir la portée pour nous : il est le pasteur, il est la porte
La figure du pasteur évoque le lien personnel entre Jésus et son disciple. Pasteur caractérisé par sa voix, qui appelle chacun des siens par son nom, voix unique à écouter, à reconnaître, voix qui établit une connaissance et une confiance mutuelles. Ce n’est pas une voix qui aliène, qui serait étrangère; elle est fiable. Elle permet de faire le passage vers l’extérieur, elle fait sortir dehors, après la nuit, dans un espace de liberté, où nous pouvons aller et venir et aussi trouver de quoi nous nourrir.
Ce lien entre le berger et les brebis est fait de confiance, de foi, de fiabilité, car ce pasteur est bon. Il n’est pas là pour utiliser les siens à son profit ou les conduire vers la destruction mais pour donner la vie, cette vie au grand air, en plein jour, une vie surabondante.
Cette figure du pasteur est mise en contraste avec d’autres, toujours actuelles, qui n’offrent ni liberté ni nourriture mais aliénation, destruction, violence. Ces autres voix, nous les entendons chaque jour, voix de personnages publics, du monde des médias, qui veulent nous dire quoi penser et faire, et qui ne se gênent pas pour inciter au mépris, à la haine, qui appellent à vivre hors de toute solidarité, chacun pour soi, à nous enfermer dans nos petits mondes et à y rester sans sortir dehors, prisonniers de nos peurs et de nos ressentiments. Voix qui installent dans un monde d’accusations, de vengeance, exaltant les racismes et fanatismes. Face à ces voix des brigands, la piste est claire: ne pas les suivre, s’enfuir loin d’elles, ne pas les écouter.
L’image de la porte est elle aussi inspirante. Elle dit autre chose que celle du pasteur. C’est une porte pour entrer dans un monde de confiance et de liberté, pour y découvrir d’autres qui nous y attendent. Une porte qui est une médiation car nous avons besoin de signes pour nous guider un peu; nous ne pouvons entrer dans le mystère directement. Une voie ouverte mais identifiable, offerte à quiconque cherche et qui lui permet d’éviter l’égarement. Cette porte donne accès à un Royaume où la vie est donnée en abondance. Porte qui est celle du Messie, par où entrer dans la ville sainte pour célébrer l’arrivée d’une libération. Porte pour entrer dans un salut et sa dynamique d’espérance.
Les murs sont omniprésents autour de nous, créant frontières et séparations étanches, fermant l’accès au mystère de l’autre. Mais cette porte qui est quelqu’un, Jésus le vivant, rend possible une libre circulation. Porte à laquelle frapper, dans l’assurance qu’elle s’ouvrira, car elle est transparence. Porte de maison, porte de ville, porte du pâturage, porte ouverte et offerte au passant en quête de pain et de rencontre, pour que le passant continue de vivre les passages.
Pasteur et porte, figures de Jésus proposées à notre méditation, pour mieux saisir et nourrir notre relation à lui, et sa relation à nous. Mais peut-être aussi pouvons-nous reprendre ces images pour nous-mêmes, dans notre relation à d’autres. Comment pouvons-nous être comme des pasteurs fiables> qui aident à passer au grand air, avec confiance, qui cultivent un lien personnel avec les autres, qui donnent accès à une vie en abondance. Comment pouvons-nous être des portes ouvertes, qui favorisent l’entrée en d’autres univers et la circulation d’un lieu à l’autre, qui font des brèches dans les murs pour que des rencontres adviennent, …