Les yeux éblouissants des jeunes enfants devant le fabuleux personnage nous portent à penser que les tout-petits croient au Père Noël. Et les jongleries comme les farces du bonhomme ne laissent aucune illusion aux plus vieux: ce n’est pas vrai!
Cependant, ce jugement n’est pas tout-à-fait juste. Dans l’univers des croyances, il faut se méfier de nos jugements. Regardons les enfants. Ils ne croient pas au Père Noël; ils savent qu’il existe, et d’une connaissance certaine. Pour eux, le Père Noël existe parce que, le 25 décembre, les enfants reçoivent des cadeaux, parfois même beaucoup de cadeaux. Que ces présents viennent de papa, de mon oncle André, ou qu’ils arrivent du Pôle Nord par l’entremise d’un gros joufflu à barbe blanche, peu importe. Les cadeaux sont là, c’est l’essentiel. Peu importe leur origine. D’ailleurs, beaucoup d’enfants oublient de dire merci. Le cadeau dans les mains, ils ont déjà oublié sa source!
Tous les grands ont d’abord été des tout-petits. Beaucoup de grands ont gardé quelque chose de leur enfance. Parfois, de belles et bonnes choses: une certaine candeur qui les maintient dans la sérénité, la confiance dans la vie, du talent, de la créativité.
Les grands ont gardé aussi le goût des cadeaux. Quel plaisir de recevoir des cadeaux! Parfois, les cadeaux deviennent des déclarations d’amour exceptionnelles. Certains cadeaux manifestent de la reconnaissance. Les cadeaux les plus réjouissants sont sans doute ceux qui sont donnés en toute gratuité. Pour rien. Juste pour le plaisir de faire plaisir.
La plupart de ces grands qui aiment recevoir ou donner des cadeaux ne croient pas au Père Noël. Ils en inventent alors les gestes de générosité. Ils sont les vrais Pères Noël! Et ils étalent leur largesse toute l’année! Bravo pour ceux et celles qui bénéficient de leurs attentions!
Quelques grands, cependant, croient au Père Noël d’une autre façon. Ils exigent que le vieux bonhomme existe. Ils sont du genre à tout demander comme si tout leur était dû. Habituellement, ces disciples du Père Noël ne pensent qu’à eux-mêmes, à leurs besoins comme à leurs caprices. À la caisse du magasin, la caissière ne va jamais assez vite auprès de ceux et celles qui les précèdent. Le médecin doit absolument les guérir, sinon c’est de l’injustice. Je souhaite que tous ces croyants aux Pères Noël magiques tirent sur la barbe du bonhomme et se rendent bien compte qu’elle est fausse. Et que c’est faux de croire que nous ayons droit à des cadeaux.
Je souhaite que Noël nous fasse choisir le chemin de la gratuité: donner pour rien, recevoir en toute gratuité. Construire ensemble un monde de partage. C’est utopique comme le Père Noël est une utopie. Mais peut-il exister une autre issue à cette planète qui est déjà tout un cadeau?