Auteur : Jerzy Popieluszko (14 septembre 1947 – 19 octobre 1984) est un prêtre catholique polonais assassiné par le pouvoir communiste en raison de son action aux côtés du syndicat libre Solidarnosc. Ses “messes pour la patrie” tous les premiers lundis du mois dans sa paroisse Saint-Stanislas-Kotska à Varsovie attiraient plusieurs milliers personnes venues écouter ses homélies où il dénonçait les violences policières et les injustices. Il a été béatifié le 6 juin 2010 à Varsovie en présence de 150 000 fidèles.
Pour demeurer libre dans l’âme, il faut vivre dans la vérité. Vivre dans la vérité, c’est donner la vérité des témoignages, c’est la revendiquer et la reconnaître dans toute situation. La vérité est immuable. On ne peut détruire la vérité par des décisions ou des décrets. L’esclavage pour nous consiste justement en ceci : que nous nous soumettions au règne du mensonge chaque jour. Nous ne protestons pas, nous nous taisons, ou bien nous faisons semblant d’y croire. Alors, nous vivons dans le mensonge. Le témoignage courageux de la vérité est un chemin qui mène directement à la liberté. L’homme qui témoigne de la vérité est un homme libre, même dans des conditions extérieures d’esclavage, même dans un camp, dans une prison. Le problème essentiel pour la libération de l’homme et de la nation est de surmonter la peur. Car la peur naît de la menace. Nous surmontons la peur, lorsque nous acceptons la souffrance ou la perte de quelque chose au nom de valeurs supérieures. Si la vérité devient pour nous une valeur pour laquelle nous acceptons de souffrir, de prendre des risques, alors, nous surmontons la peur qui est la cause directe de notre esclavage […].
La peur est le plus grand manquement de l’apôtre. Elle serre le cœur et rétrécit la gorge. Celui qui se tait face aux ennemis de la bonne cause, les enhardit. Forcer au silence par la peur, telle est la première tâche dans la stratégie impie. Le silence a son sens apostolique uniquement quand je ne détourne pas mon visage devant ceux qui me frappent […].
Je voudrais répondre à tous ceux qui souffrent en terre polonaise et je désire m’adresser d’ici aux autorités de la République populaire de Pologne, pour que ces larmes cessent. La société polonaise, ma nation, ne mérite pas d’être poussée aux larmes du désespoir et de l’abattement. Oui, une nation qui a tellement souffert dans son passé récent, ne mérite pas que beaucoup, parmi les meilleurs de ses fils et filles, séjournent dans les camps et les prisons ; elle ne mérite pas que sa jeunesse soit malmenée et battue, que le crime de Caïn soit commis. Elle ne mérite pas qu’on la prive, contre sa volonté, du syndicat Solidarité.
Homélie (septembre 1982)