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Parole et vie,

Responsable de la chronique : Jacques Marcotte, o.p.
Parole et vie

21e Dimanche du temps ordinaire. Année A

Imprimer Par Jacques Marcotte, o.p.

Contre vents et marées ! Une Église servante et pauvre

Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 16,13-20. 
Jésus était venu dans la région de Césarée-de-Philippe, et il demandait à ses disciples : « Le Fils de l’homme, qui est-il, d’après ce que disent les hommes ? » 
Ils répondirent : « Pour les uns, il est Jean Baptiste ; pour d’autres, Élie ; pour d’autres encore, Jérémie ou l’un des prophètes. » 
Jésus leur dit : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » 
Prenant la parole, Simon-Pierre déclara : « Tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant ! » 
Prenant la parole à son tour, Jésus lui déclara : « Heureux es-tu, Simon fils de Yonas : ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux. 
Et moi, je te le déclare : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle. 
Je te donnerai les clefs du Royaume des cieux : tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les cieux. » 
Alors, il ordonna aux disciples de ne dire à personne qu’il était le Messie.

COMMENTAIRE

Les mots ce matin sont forts et tranchés. C’est comme cela qu’ls apportent du neuf. Les paroles prononcées là-bas, dans la région de Césarée-de-Philippe, nous donnent l’heure juste sur Jésus, sur son identité messianique. Elles nous révèlent presque du même souffle les intentions du Seigneur sur ses disciples. Simon Pierre transcende les catégories et les références communes pour reconnaître en Jésus plus qu’un prophète, « Tu es le Messie, le fils du Dieu vivant. » Jésus lui rend la monnaie de sa pièce en lui confiant une mission qui le dépasse, bâtissant sur lui son Église.

Pierre avait dit ça spontanément. Sa foi visait juste. Jésus s’en étonne et s’émerveille. Il enchaîne à son tour une parole qui engage drôlement. Voici que Pierre aura un rôle de premier plan dans l’aventure où les disciples vont eux aussi s’embarquer. Étonnante investiture, où Pierre se voit confier une responsabilité inouïe ! Tout s’est passé tellement vite, comme une échappée de lumière : les mots de Pierre à propos de Jésus, et ceux de Jésus à propos de Pierre.  Mais, à Césarée-de-Philippe, on est loin de Jérusalem, sur un terrain neutre, au bout du monde, et dans ce cadre les paroles peuvent donner librement leur résonance et révéler toute leur portée fondatrice. Une merveilleuse histoire va commencer.

Après deux mille ans, l’Église du Christ ne fait pourtant pas encore l’unanimité. Elle est toujours fragile. Si on se rappelle encore du bon vieux temps où tout allait si bien pour l’Église, on n’a pas à fouiller longtemps pour reconnaître les maladresses, les erreurs d’aiguillage survenues plus d’une fois et même aux âges d’or de la foi. La fidélité, la compassion, la sagesse du Maître semblent bien n’avoir pas toujours été au rendez-vous. Bien souvent l’Église s’est retrouvée dans l’ambiguïté, aux prises avec des situations troubles et difficiles. Les vents étaient contraires à l’élan souhaité, à la direction voulue. C’est à croire que l’Église s’épuise, qu’elle se cherche, qu’elle manque de ressources. Plusieurs en sont venus à douter d’elle, à s’en moquer, à désespérer de l’Église du Christ. Sa mission serait-elle impossible ?

Pourtant, Jésus et son Père ont certainement raison quelque part. Dieu a voulu que son Église soit humaine. N’est-il pas là le grand défi ? Une Église pour des hommes et des femmes, avec des hommes et des femmes. Elle sera donc terrestre et non pas céleste ou angélique. Avec le risque de se tromper parfois, de s’égarer peut-être ? Fallait-il que l’Église fût parfaite ? Qu’elle dise toujours le premier et le dernier mot sur tout ? N’a-t-elle pas vocation d’être servante et pauvre, à l’image du Crucifié, alors même qu’un Esprit de Pentecôte l’anime ?

Malgré les faiblesses, avouées ou non, de l’Église, nous croyons qu’elle est le grand œuvre de Dieu au milieu du monde. La foi exemplaire de Pierre venait de Dieu, l’autorité et la force de l’Église et ses capacités lui viennent de Dieu. L’Église, dans son essence, est un beau cadeau du bon Dieu. Elle est surtout un mystère, une merveille d’amour qui nous est confiée. Sachons respecter l’Église dans ce qu’elle est profondément, y mettre le meilleur de nous-mêmes. Il n’est pas dit que l’Église ne verra plus la tourmente. Il est dit, avec force, qu’elle ne saurait connaître l’échec total ou la mort. Si certaines périodes furent toutes belles d’élans magnifiques de l’Église au long des siècles, d’autres époques l’ont vu avoir sa part aux malheurs des temps, aux turbulences des mœurs, aux souffrances des sociétés. Sachons pourtant que, malgré tout, l’Église a en elle de quoi rebondir et se réformer sans cesse.

Ce matin elle nous est confiée à nouveau cette Église comme à chaque Eucharistie. Puissions-nous, joyeux et libres, nous laisser renouveler dans la fidélité, dans la foi, pour une réponse d’amour à l’amour reçu dans le Fils, le Fils du Dieu vivant, notre Sauveur, notre Seigneur.

 

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