Un voyageur, fatigué de sa route, s’est arrêté près du puits d’un village. Il a soif. Une villageoise se présente au puits pour puiser de l’eau pour ses besoins quotidiens. Elle aussi, elle a soif. La conversation s’engage entre ces deux assoiffés.
La scène est bien simple. Elle n’a rien d’extraordinaire. Combien de fois n’avons-nous pas vécu une telle rencontre près d’une distributrice de jus et de boissons gazeuses?
Or, le récit nous est offert dans l’évangile de saint Jean. N’est-ce pas curieux qu’une telle anecdote nous soit rapportée dans l’évangile. L’évangile n’est-il pas un écrin trop précieux pour contenir une telle banalité?
À moins que la scène ne cache un message plus riche que l’évocation d’une simple rencontre. Le dialogue entre l’homme et la femme peut nous révéler une vérité de grande portée non seulement pour la femme, mais encore pour chacun et chacune d’entre nous.
Dans la soif qui amène la femme au puits se cachent bien d’autres soifs. Et d’abord la soif d’aimer. Nous avons besoin de nous désaltérer les uns des autres. Tout en admettant que plus nous aimons, plus se creuse en nous la soif d’aimer, au point que l’amour devienne une passion que nous ne parvenons pas à contrôler facilement. Elle peut nous engager dans le service fraternel des autres. Elle peut nous entraîner dans le combat en faveur de la justice et de la paix. Elle peut même déployer nos élans amoureux jusqu’à consacrer notre bonheur tout entier à aimer une personne plus que tout au monde. Et à construire avec elle une famille où ensemble nous éveillerons de nouvelles soifs, même des enfants que nous aiderons à devenir à leur tour des assoiffés.
Le voyageur, assis à la margelle du puits connaît bien les soifs de la femme comme il connaît bien nos propres soifs. Et il offre une eau désaltérante comme nulle autre ne peut le faire : «Si tu savais le don de Dieu, si tu connaissais celui qui te dit : « Donne-moi à boire », c’est toi qui lui aurais demandé, et il t’aurait donné de l’eau vive.»
Il nous arrive de recevoir l’eau vive, ce don de Dieu. De bien des façons, Dieu nous rejoint au puits des villages que nous habitons. Dieu reconnaît nos soifs et veut nous désaltérer.
Toutes ces présences de Dieu auprès de nous trouvent leur origine et leur accomplissement à la fontaine de notre baptême. Le voyageur de notre récit s’y laisse reconnaître comme le Sauveur du monde. En priant pour les futurs baptisés de Pâques, accueillons celui qui est plus que tout le don de Dieu, l’eau vive par excellence. Comme à la femme de Samarie, il nous dit : « Celui qui boira de l’eau que moi je lui donnerai n’aura plus jamais soif et l’eau que je lui donnerai de viendra en lui source jaillissante pour la vie éternelle.»