Pierre d’angle ! Les journaux du monde entier ont publicisé en première page avec respect et chaleur cette encyclique de Jean XXIII, et beaucoup lui ont consacré un éditorial. « Encyclique de la coexistence pacifique », titrait un journal polonais. L’agence « Tass » de Moscou diffusait même un résumé du document. « L’Humanité » de France écrivait : « Cet appel retentissant réussira-t-il à émouvoir les hommes d’état catholiques…», et le « New York Herald Tribune » déclarait : « Le document s’adresse à tous les hommes sans distinction de race, de religion ou de croyance politique ». De Rome, l’« Avanti » affirmait : « l’œuvre marque dans l’histoire de l’Église et du monde un tournant d’une extraordinaire importance, dont les conséquences positives ne manqueront pas de se faire sentir ».
Le secrétaire général des Nations unies, U Thant déclarait pour sa part : « La teneure de ce texte est certes en concordance avec les conceptions et les objectifs des Nations Unies ». « Un document capital, dit le grand rabbin Kaplan, il traite des problèmes les plus graves et les plus urgents de notre temps, et la vigoureuse position prise en faveur des droits de l’homme, y compris le droit pour chacun de confesser la religion de son choix ». Enfin, le pasteur André de Robert affirmait : « Événement décisif, pour toutes les Églises chrétiennes qui auraient l’occasion d’entrer dans un grand dialogue de chrétienté pour déclarer ensemble quelque chose à partir de Jésus Christ ».
Pourquoi recenser ce livre du passé et de plus un écrit papal ? L’encyclique de Jean XXIII, « Pacem in terris » publiée le Jeudi Saint, 11 avril 1963, quelques semaines avant sa mort, mérite, même en 2014, une lecture réfléchie. L’occasion s’y prête on ne peut mieux: Jean XXIII sera canonisé avec Jean-Paul II, le 27 avril prochain.
Moins de deux décennies après la Seconde Guerre mondiale, en plein contexte de guerre froide, l’encyclique « Pacem in terris » a posé les principes nécessaires à l’instauration d’une paix durable entre les peuples. Ce texte papal a partout dans le monde marqué les esprits. C’était la toute première encyclique adressée à tous « les hommes de bonne volonté ». Elle faisait la promotion de la vérité, la justice, la charité et la liberté.
S’il fallait analyser – question de susciter le goût de lire – le contenu de cette lettre pontificale adressée au monde entier, nous serions séduits par la pensée et l’allégresse qui la caractérisent. Pour l’Église selon Jean XXIII, l’homme est au centre du monde. Chacun possède une dignité extraordinaire, la faute originelle n’a fait qu’obscurcir dette dignité. L’homme garde toujours en soi le goût de la vérité et le besoin de justice. Tous, qu’ils soient chrétiens, protestants, musulmans, juifs ou autres, ont au fond d’eux-mêmes le désir d’un monde fraternel. Le racisme, le colonialisme ou le nationalisme sont à bannir. Un travail en commun pour restaurer l’ordre de la paix, voilà ce qu’il nous faut réaliser aujourd’hui comme hier.
« Pacem in terris » comporte quatre sections. La première concerne les relations entre individus et les droits de l’Homme. La deuxième développe le lien entre l’individu et l’État. La troisième établit le besoin d’égalité entre les nations, et en quatrième section, la présentation du besoin de plus grandes relations entre les nations. L’encyclique termine par un appel à tous, d’aider les non-chrétiens et les non-catholiques au niveau politique et social. En somme, ce texte met surtout l’accent sur le fait que chaque humain a le droit de vivre, droit au respect de son intégrité physique et droit aux moyens de subsistance nécessaires à un développement de vie humaine.
Écrit pour son temps, « Pacem in terris » de Jean XXIII peut éclairer toutes les époques, la nôtre en particulier. Trois traits constituent le panorama de l’encyclique: la promotion sociale des classes laborieuses, l’entrée de la femme dans la vie publique et la situation de peuples dominateurs sur des peuples dominés.
En conclusion, ce texte majeur demande profonde considération de tous et de chacun : « Une fois de plus, l’Église nous invite à participer activement à la gestion des affaires publiques et nous demande de contribuer à promouvoir le bien commun de toute la famille humaine ainsi que de leur propre pays. Éclairés par leur foi et mus par leur charité, nous nous efforcerons ainsi d’obtenir que les institutions relatives à la vie économique, sociale, culturelle ou politique ne mettent pas d’entrave, mais au contraire apportent une aider à l’effort de perfectionnement des hommes, tant au plan naturel qu’au plan surnaturel. »
Un dernier mot ! Étonnamment, deux musiciens ont mis en musique certains textes de l’encyclique « Pacem in terris »: Darius Milhaud (1892-1974) et Marco Frisina. Milhaud a composé en 1963 « La Symphonie chorale « Pacem in terris » pour chœur et orchestre sur un texte tiré de l’encyclique du pape Jean XXIII. Marco Frisina, né à Rome en 1954, musicien, compositeur, chef d’orchestre et prêtre a écrit de nombreuses œuvres notamment pour le pape Jean-Paul II et composé les bandes originales de Papa Giovanni – Joannes XXIII (2002) . Je vous en recommande l’audition. On trouvera ce complément musical sur « Youtube Darius Milhaud+Pacem in terris » et « Youtube Frisina+Jean XXIII ».