Évangile de Jésus Christ selon saint Matthieu 3,13-17.
Jésus, arrivant de Galilée, paraît sur les bords du Jourdain, et il vient à Jean pour se faire baptiser par lui.
Jean voulait l’en empêcher et disait : « C’est moi qui ai besoin de me faire baptiser par toi, et c’est toi qui viens à moi ! »
Mais Jésus lui répondit : « Pour le moment, laisse-moi faire ; c’est de cette façon que nous devons accomplir parfaitement ce qui est juste. » Alors Jean le laisse faire.
Dès que Jésus fut baptisé, il sortit de l’eau ; voici que les cieux s’ouvrirent, et il vit l’Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui.
Et des cieux, une voix disait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; en lui j’ai mis tout mon amour. »
COMMENTAIRE
Savez-vous que les plantes ont besoin qu’on les aime ? « Il faut parler aux plantes », me disait quelqu’un. « Les plantes ne sont quand même pas des personnes », direz-vous. – « Mais que savons-nous de leur sensibilité ? Pourquoi ne réagiraient-elles pas positivement à la confiance, à de bons sentiments ? Rappelez-vous la rose du Petit Prince. »
C’est plus évident avec les animaux. Prenez le chat ou le chien, si vous l’aimez ou si vous ne l’aimez pas, il le sent, il le sait. Quant aux humains, qu’ils soient en couple ou en famille, nous savons leur besoin d’amour. Nous savons la puissance de l’amour dans l’éducation, dans les relations de travail, et partout. Quand nous y mettons du cœur et de l’affection, les choses vont toujours mieux entre nous. L’amour donne des ailes, fait passer les épreuves, supporte les difficultés. Il met parfois du temps à se dire. Parfois il est là sans même en avoir l’air.
Récemment je rencontrais une famille pour des funérailles. Au moment de parler de celui qui venait de les quitter, les gens m’ont rapporté que, pendant des années, le défunt s’était montré timide, taciturne, incapable de dialogue avec ses enfants. Longtemps il s’était pourtant dévoué, fidèle à ses tâches, mais toujours aussi renfermé, incapable de communiquer. À la maison, on avait tout ce qu’il fallait, sauf qu’il manquait quelqu’un, et c’était le père. C’est seulement dans les toutes dernières semaines, alors que la maladie allait l’emporter, que l’homme s’est mis à parler plus librement, à s’ouvrir, reprenant le temps perdu par toutes sortes de flashes back sur son enfance, sur ses années de maturité. Dans la tendresse et l’émerveillement, les siens retrouvaient enfin le papa, présent sur le mode de la confidence plutôt que sur celui du silence. Ils ont alors fait la relecture de leur vécu familial pour y trouver un père qui au fond les aimait sans avoir le moyen de leur dire son amour. S’il est difficile d’aimer, il est peut-être plus difficile encore de dire qu’on aime.
Ce thème de l’amour qui se dit, il est mis de l’avant au moment du baptême de Jésus. Quand Dieu déchire le ciel pour nous dire qu’il aime son fils, ce n’est pas pour nous dire qu’il ne l’aimait pas avant, mais c’est parce qu’il fallait qu’il nous l’apprenne pour que nous comprenions que l’amour est au cœur du mystère du Christ. « Dès que Jésus fut baptisé, il sortit de l’eau ; voici que les cieux s’ouvrirent, et il vit l’Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui. Et des cieux, une voix disait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ; en lui j’ai mis tout mon amour. »
C’est quand on est aimé qu’on aime. L’amour éternel du Père est premier et fondateur pour le Fils. Il appelle une réponse d’amour qui ira jusqu’à la Passion. Le temps de Noël s’achève ici. Le Père nous dévoile l’identité véritable de Jésus, son identité de Fils bien-aimé. Il le met au monde pleinement.
Quand nous avons été baptisés, il s’est passé la même chose. Nos parents ont donné à Dieu la chance de dire qu’il nous aimait, et que nous étions pour lui des fils et des filles bien-aimés. J’ai souvent remarqué la fierté des parents lors du baptême de leur enfant. Comment pourrait-il en être autrement devant l’affirmation forte et particulière par laquelle Dieu notre Père donne vie nouvelle et Esprit d’amour à leur enfant. Les parents s’inscrivent alors dans un mouvement qui les dépasse, pour un événement de très grande portée.
Jésus a donné suite à l’amour reçu du Père. Dans un élan d’amour personnel, dans le don de lui-même, par des prises de parole libératrices, il a posé des gestes amoureux et sauveurs. De même notre baptême nous entraîne vers le don, vers l’amour du prochain, vers la paix et le pain partagé. « Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés, dit Jésus. Demeurez dans mon amour… Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. ».