L’automne vient d’accoster sur les rives du Saint-Laurent. L’été tardait à partir. Pour notre joie, il nous a quittés en laissant derrière lui ses derniers rayons de soleil. Alors, l’automne a ouvert les bras. Il recueille ces trésors de chaleur. Il va bientôt les utiliser pour repeindre les paysages. Le vert se mariera avec le rouge bourgogne, le jaune doré et tous les tons de brun. Comme beaucoup de mes compatriotes, j’attends que le rideau se lève et que commence le spectacle.
Chaque année, septembre ramène l’automne. Et la saison, en artiste talentueuse, recrée ses douceurs. Toujours les mêmes tableaux, et pourtant, j’ai l’impression de me retrouver devant de l’inédit. Les autres saisons m’ont sans doute distrait au point d’avoir oublié les charmes de l’automne. À moins que mes états d’âme transfigurent la nature ou se laissent transfigurer par elle.
J’aime l’automne. Mais mon amour n’est pas partagé par tous les gens du Québec et des régions maritimes. Plusieurs n’attendent pas novembre pour se plaindre des froidures qui agacent leurs vieux os. Certains redoutent les fins de journée quand la pénombre allonge la nuit. D’autres voient déjà venir les grands vents, les pluies abondantes, les orages tonitruants. Pour plusieurs, l’hiver fait déjà partie de leur paysage intérieur.
Chacun a son calendrier des saisons. Jour après jour, nous essayons de tricoter ensemble nos états d’âme. Ce n’est pas toujours facile. Nous ne cheminons pas tous au même rythme. Nous ne partageons pas tous les mêmes rêves.
Cette diversité ne nous plaît pas toujours. Mais elle a ses bons côtés. Bien sûr, elle attire notre attention sur nos oppositions. Elle suscite des affrontements et des incompréhensions. Mais ce choc de nos tempéraments – et même de nos cultures – peut cohabiter avec l’harmonie. Il peut nous apprendre à vivre ensemble en nous accommodant les uns des autres de façon très raisonnable. Nous partageons certaines valeurs mais il existe des valeurs que nous ne partageons pas tous et qui n’en sont pas moins de grandes valeurs, dignes de respect. Elles ont droit d’exister en toute liberté, au-delà des opinions et des convictions personnelles. Nous ne vivons plus dans l’uniformité d’une seule et unique culture.
Les nations unies ne siègent pas seulement à New York. Elles habitent la même planète. Elles sont invitées à s’unir dans le respect de leurs différences et de leurs talents.