Le Père et le Fils font fleurir le Saint Esprit
Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 14,15-16.23b-26.
À l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples : « Si vous m’aimez,
Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous :
Jésus dit alors à ses disciples : « Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole ; mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui.
Celui qui ne m’aime pas ne restera pas fidèle à mes paroles. Or, la parole que vous entendez n’est pas de moi : elle est du Père, qui m’a envoyé.
Je vous dis tout cela pendant que je demeure encore avec vous ;
mais le Défenseur, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit.
« L’Esprit de Dieu habite en vous et fait de vous des fils. » Avec les jeunes, il est assez facile de parler de Dieu en général ; c’est un peu plus difficile d’aborder le mystère de la personne de Jésus, à la fois Dieu et homme ; c’est encore plus difficile d’essayer de parler de l’Esprit Saint.
L’Esprit est pourtant le dynamisme intérieur de notre foi, de notre vie, de notre amour, de notre prière, de notre espérance. Il est à la source de tout ce qui nous est personnellement et communautairement essentiel. C’est lui qui anime la communauté chrétienne : sans la présence de l’Esprit, il n’y a pas d’Église possible. Certes, comme le dit saint Jean, on ne sait « ni d’où il vient ni où il va » (Jn 3,8). Il est insaisissable, il échappe aux définitions. Le vent ne se laisse pas saisir dans nos mains. On ne connaît l’Esprit que par ses effets comme on perçoit le vent quand il agite les arbres. Saint Paul tente assez bien de nous parler de l’Esprit à travers ses effets dans le chapitre 8 de l’épître aux Romains.
« L’Esprit de Dieu habite en vous. » Cette affirmation est une sorte de refrain qui revient plusieurs fois chez saint Paul (Rm 8,9 ; 1 Co 3,16 ; 6,19). C’est la principale conséquence du mystère pascal puisque « l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné » (Rm 5). L’Esprit de Dieu a été, littéralement, « versé » dans nos êtres et il habite en nous. Nous sommes ainsi devenus à notre baptême des demeures de la Sainteté de Dieu. « Ne savez-vous pas que vous êtes un temple de Dieu, et que l’Esprit de Dieu habite en vous ? » (1 Co 3,16). L’Esprit réalise ainsi le grand désir de Dieu d’être « Dieu-avec-nous », Emmanuel. « Je vous donnerai un cœur nouveau ; je mettrai mon Esprit en vous… Vous serez mon peuple et moi je serai votre Dieu » (Ez 36,26-28). N’est-ce pas ce qui se réalise à la Pentecôte ? « Je serai avec vous tous les jours » promet Jésus à la fin de l’évangile de Matthieu. L’Esprit réalise en chacun de nous cette union et cette solidarité promise par Jésus. L’humanité tout entière est appelée à devenir le Temple de la Présence de Dieu. Notre Terre est appelée à devenir le ciel de Dieu, le Royaume des cieux.
« L’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts habite en vous… et donnera la vie à vos corps mortels. » L’Esprit, c’est la Vie du Dieu Vivant qui vit en nous, la Vie du Ressuscité qui habite dans nos êtres mortels. Celui qui est « la Résurrection et la Vie » a soufflé sur nous son souffle vivifiant pour que nous vivions de sa vie !
« Tous ceux qui se laissent conduire par l’Esprit de Dieu sont enfants de Dieu. » Tout le dynamisme de nos existences humaines dans la foi est animé de l’intérieur par cette présence de l’Esprit. Notre vie spirituelle comme notre vie morale est une vie de grâce : l’Esprit agit en nous comme un guide intérieur qui nous conduit. Vivre dans l’Esprit consiste à s’offrir librement à l’action de Dieu en nous : « Que ta volonté soit faite. » Il n’est nullement question ici d’obéir à une volonté ou à une loi divine qui s’imposerait à nous de l’extérieur car l’Esprit Saint est la loi vivante que Dieu inscrit dans notre intériorité. C’est ce que Dieu avait jadis annoncé par le prophète Jérémie : « Je mettrai ma loi au fond de leur être et je l’écrirai sur leur cœur. Alors je serai leur Dieu et eux seront mon peuple » (Jr 31,33).
« L’Esprit fait de vous des fils ; poussés par cet Esprit, nous crions vers le Père : Abba ! » L’Esprit est à la source de toute prière. Il n’y a pas de prière chrétienne qui ne sollicite la collaboration de l’Esprit. C’est lui qui prie en nous. C’est lui qui nous unit dans la prière. C’est lui qui agit dans la célébration de l’Eucharistie. Nous sommes des temples où l’Esprit fait monter vers le Père la prière de Jésus. Le chrétien « adore le Père en Esprit et en vérité » (Jn 4,23). Sans le secours de l’Esprit, « nous ne savons pas prier comme il faut ! » (Rm 8,26).
« L’Esprit fait de nous des enfants de Dieu, héritiers de Dieu avec le Christ… » Notre héritage, c’est la gloire de Dieu. Le jour de la Pentecôte, le feu s’est posé sur chacun des apôtres et tous furent remplis de l’Esprit Saint. Personne n’a été oublié. Le don de l’Esprit Saint est pour tous. À la Pentecôte, la malédiction de Babel est renversée : l’Esprit permet à toutes les langues de comprendre l’Évangile. La multiplicité des langues n’est plus un obstacle à l’unité de l’Église et à la communion entre tous !
« Si quelqu’un m’aime dit Jésus, mon Père l’aimera et nous viendrons chez lui et nous ferons chez lui notre demeure… » C’est l’amour qui est au cœur de la relation entre le Père et le Fils, comme il est au cœur de la relation entre Jésus et nous et aussi entre le Père et nous. Ce lien d’amour, c’est l’Esprit Saint en Personne. Maître Eckhart écrit que le Père et le Fils « font fleurir le Saint-Esprit ». Qu’en cette solennité de Pentecôte le Père et le Fils fassent fleurir l’Esprit en chacun de nous, dans l’ensemble de l’église, et sur toute l’humanité.
Frère Dominique CHARLES o.p.