J’ai eu la chance d’assister à une conférence du grand pédagogue Philippe Meirieu il y a peu. Ce fut très ressourçant, d’une part pour mon métier d’enseignante, bien entendu, mais d’autre part pour cette leçon de vie qui peut nous être inspirée. Philippe Meirieu a toujours valorisé une approche coopérative des apprentissages. Les enfants s’entraident et ainsi s’aide à apprendre. Pour lui, le groupe doit avoir la part du lion à l’école.
Il évoquait, durant cette conférence, son inquiétude face aux écrans qui inondent la vie de notre société. Ils nous individualisent et nous rendent plus individualistes. Si autrefois, il fallait un village pour éduquer un enfant, maintenant, l’éducation est réduite aux experts et chacun se déresponsabilise d’un quelconque rôle à tenir face aux enfants « du village ». Si, cinquante ans plus tôt, monsieur Leblanc se sentait le devoir de reprendre une conduite dangereuse ou inappropriée d’un petit voisin, aujourd’hui il se tait. Il se garde bien d’intervenir car il sent que cela ne le regarde pas !
Pourtant l’autre nous « regarde ». Comment construire un monde commun si chacun ne regarde que sa bulle ?
Il en est de même pour le couple, le couple ne peut se réduire à son foyer, aussi ardent soit celui-ci… Il a besoin d’exister, en tant que couple, sous le regard du village ! Car, non seulement l’enfant a besoin de tout un village pour grandir, mais chaque villageois a ce même besoin. Et le village, lui, n’est rien sans chacun des villageois !
Les premiers disciples le comprennent. Ils vont créer les premières communautés. Ils savent que la foi a besoin de la communauté pour pleinement exister et grandir.
Si Jésus revenait, il ferait sans doute le « buzz ». Mais, ce serait de courte durée, car chacun retournerait à son écran et chercherait de nouveaux horizons vers lesquels naviguer…seul. Car, les algorithmes individualisent nos recherches et s’adaptent à notre profil. Ils sculptent le monde selon notre vision.
L’enfant, le couple, la foi ont besoin d’interactions, de confrontations d’idées pour exister. On peut en effet s’interroger sur, non seulement l’attraction des écrans qui nous captent et nous rendent addicts, mais également les algorithmes qui nous enferment sur nous-mêmes et notre horizon propre. Il est si difficile d’emblé pour un humain de comprendre l’autre, les algorithmes risquent de rendre cela encore plus compliqué !
Ce sont des questions importantes qui concernent pleinement les jeunes couples appelés à s’unir. Comment s’ouvrir et entrer dans l’univers de l’autre qui est différent de moi alors que mes amis de réseaux sociaux me ressemblent tous (sinon je les bloque) ? Comment accepter et tolérer la différence ?
C’est un apprentissage qui se fait en s’ouvrant sur le monde et aux autres. Cela prend tout un village pour permettre à l’amour d’un couple de durer toute une vie !