D’abord les pauvres!
« Jésus descendit de la montagne avec les Douze et s’arrêta sur un terrain plat. » C’est-à-dire dans la plaine, comme pour être à la hauteur de tout l’monde. De quoi leur parle-t-il? De bonheur et de malheur, de rires et de pleurs, d’amour et de haine; de tout ce qui fait le lot des hommes et des femmes, au quotidien et dans leur rapport les uns avec les autres. Il parle des valeurs que lui-même il a choisies de vivre et qu’il souhaite voir vivre par ses disciples. Il leur parle aussi de ce dont il voudrait qu’ils s’écartent pour ne pas y perdre leur âme.
Lors des précédents dimanches, au fil de l’Évangile selon saint Luc, nous avons considéré le mystère du Christ en lui-même. Jésus de Nazareth, l’envoyé du Père, venu accomplir les promesses de Dieu pour son peuple, venu combler l’espérance des pauvres. Jésus dont le destin a été de n’être pas accueilli chez les siens. Un rejet qui par la miséricorde et la grâce du Père, sera déjoué dans le mystère de la mort et de la résurrection du Christ. Déjà s’annonce la victoire pascale, la sienne et la nôtre avec lui!
Jésus, Christ et Seigneur, a voulu aussi nous associer à son œuvre, à la mission de Salut qui lui est confiée par le Père. Et nous avons vu Simon-Pierre et ses compagnons être initiées par le Maître au défi de la mission en vivant l’audace et la fécondité surprenante d’une pêche mémorable.
« Jésus descendit de la montagne avec les Douze… » Nous nous retrouvons donc aujourd’hui pour cette mission avec Jésus. « Levant les yeux sur ses disciples, il déclara. » C’est à nous d’abord que le Seigneur s’adresse. Il aborde les thèmes que déjà nous connaissons pour les avoir entendus résonner dans nos propres vies et chez ceux qui nous entourent : pauvreté, richesses, faim et soif, persécutions, abondance et dénuement. Des situations éprouvées dans nos vies toujours confrontées aux valeurs et changements qui nous affectent.
Le 3e évangile, on le sait, est particulièrement attentif aux conditions sociales et économiques de ceux qui composent le groupe des disciples et l’auditoire de Jésus. Ils sont le plus souvent de la classe des défavorisés. Luc a un parti pris pour les pauvres, les malades, les femmes, les publicains et les pécheurs. Il tend à montrer que l’Évangile les concerne eux d’abord. Jésus lui-même a choisi d’être pauvre, proche des pauvres.
Certes le proverbe « Mieux vaut être riche et en bonne santé, que pauvre et malade » est toujours vrai. Il ne s’agit pas de louer ou de rechercher la misère pour elle-même, loin de là! Ce dont Jésus nous parle c’est d’espérance pour les petits et les humbles. Il parle d’un avenir pour eux, de la compassion divine dont ils sont l’objet et des promesses qui les concernent. « Heureux, vous les pauvres, car le Royaume de Dieu est à vous ». Le bonheur que vous cherchez, vous l’aurez. Parce que Dieu vous regarde. Il a entendu votre cri. Il est proche de ceux qui souffrent. Il prépare pour eux un monde nouveau. Faites-lui confiance! Mettez en lui votre espérance!
Bonheur pour ceux qui mettent leur confiance dans le Seigneur. Dieu saura les combler un jour. Mais dommage pour celui, qui, prisonnier de ses richesses, en oublie le Seigneur et le prochain. Il pense se suffire à lui-même mais, en fait, il fait pitié. Il n’y a pas d’avenir pour celui qui reste égoïstement dans sa bulle. Il nous est préférable d’être moins riches, de partager d’autres notre superflu. Dieu regarde pour son cœur. Or, il n’a pas de cœur celui qui ne s’ouvre pas au partage avec amour.
Il fait fausse route et se tient dans l’illusion celui qui ne jure que par ses biens et les bonheurs éphémères, sans égard pour le pauvre, sans attendre ce que Dieu s’offre à lui donner : à savoir, la paix intérieure, la consolation du cœur et de l’âme, le bonheur sans fin. Il s’agit au fond de reconnaître ce qui donne du sens et de la plénitude à nos vies. Comprenons que Dieu seul peut combler nos faims et nos soifs profondes.