Corps livré! Sang versé! Vie nouvelle!
On se rappelle le Congrès eucharistique international de Québec, pendant toute une semaine, en juin 2008. Dans le cadre du 400e de la Ville. La pluie! Les rassemblements! Les ateliers et les kiosques! Les conférences! Un congrès longuement et soigneusement préparé. Dans les paroisses, les catéchèses offertes! Les retombées spirituelles furent importantes pour bien des gens, en fonction, on peut le penser, de leur désir, de leur engagement et de leur participation.
Aujourd’hui, c’est d’une fête plus simple et plus ordinaire de l’Eucharistie qu’il s’agit. Mais c’est toujours un temps précieux pour considérer une réalité bien importante pour notre vie ecclésiale. Les passages de l’Écriture que nous avons entendus nous donnent d’approfondir, une fois de plus, le sens religieux et l’enracinement historique de notre foi dans l’Eucharistie confiée à l’Église comme un trésor.
Le texte de l’Évangile nous le disait à l’instant, Jésus nous a laissé les rites de base de la messe dans le cadre de la célébration de la Pâques juive, au soir de la dernière cène, le Jeudi Saint. La Pâque évoquait traditionnellement deux évènements marquants, l’un et l’autre fondateurs, dans la destinée d’Israël : d’une part, la sortie d’Égypte, quand les Hébreux furent tirés de l’esclavage où les tenait le pharaon. C’était le souvenir heureux d’une libération politique décisive. La Pâque nous rappelle que Dieu a eu compassion de son peuple et qu’il a suscité Moïse pour en faire un chef capable de rallier tous les Hébreux hésitants et craintifs. L’autre évènement souligné par la Pâque, c’est le don de la Loi au Sinaï et l’entrée en alliance de Dieu avec son peuple qui devra dès lors s’engager à observer les lois qu’il lui donne.
L’Eucharistie chrétienne s’enracine profondément dans ce cadre d’une libération et d’une alliance renouvelée avec Dieu. Mais si le dernier repas de Jésus avec les siens s’inscrit dans la tradition ancienne, c’est pour un accomplissement et un dépassement dans un monde nouveau. En effet la proximité de la passion, la mort et la résurrection du Christ donne aux rites accomplis par Jésus ce soir-là une valeur d’anticipation du don qu’il va faire de lui-même sur la croix. Son corps livré pour nous. Son Sang versé pour nous. Pour que nous vivions d’une vie nouvelle!
Cette fois, comme le souligne la lettre aux Hébreux en 2e lecture, le sang de l’Alliance ne vient pas d’un sacrifice offert avec des animaux, mais c’est le Christ lui-même qui s’offre en sa chair dans l’amour le plus total. Et cette offrande, c’est celle du Fils de Dieu, c’est celle d’un Dieu qui accepte de se livrer ainsi pour notre libération la plus profonde. Pour l’alliance toute nouvelle et éternelle qu’il engage avec nous.
Le sacrifice du Christ a eu lieu une fois pour toute. L’Eucharistie célébrée en mémoire de lui, comme il nous a dit de le faire, permet au Christ de nous rejoindre en sa puissance de vie, de nous toucher de sa force rédemptrice. Nous sommes mis réellement en contact avec un mystère d’amour qui transcende les temps et les espaces, qui défie les lourdes résistances du passé, de ce qui ne peut que vieillir et mourir.
Tout cela pour que nous soyons nourris, fortifiés d’énergies nouvelles et divines, et pour que nous portions du fruit pour Dieu, fruits d’amour et de charité, fruits de justice et de paix, fruits de communion, fruits de tout ce qui est aux couleurs et aux accents du Royaume de Dieu. Faire « Eucharistie », c’est effectivement rendre grâce pour cette action sainte par où Dieu sauve son peuple dans le Christ, le libère du péché et de la mort, faisant alliance nouvelle et définitive avec lui.