La pandémie du Covid-19 passe lentement derrière nous. Elle nous aura tenus en alerte et retrait pendant trop longtemps! Nous étions privés de liberté, sans jamais voir ni la fin de l’hiver ni la venue du printemps! Mille petites choses habituelles nous ont manqué. La vie avait perdu de son charme. Nous avons vécu toute la gamme des bons sentiments et des ressentiments.
Maintenant nous avons un peu pris l’habitude du confinement absolu et des gestes barrières. Nous nous sommes un peu emmurés dans notre cocon. Il fallait se protéger du méchant virus, apprendre à vivre quelque part ailleurs, loin de lui. Nous devions nous tenir prudemment à l’écart comme dans une caverne. Il fallait presque nous réfugier dans un « bunker » bien étanche, à l’abri de l’ennemi invisible. Prêts à riposter à toute menace de ce virus malfaisant! Nous nous sommes forcément adaptés à une vie recluse. Jusqu’à en oublier peut-être notre vie d’avant. Jusqu’à ne plus imaginer une vie après. C’était un peu le temps en dehors du temps!
Et nos premiers pas maintenant seront probablement hésitants, parce que nous avons perdu nos manières et nos repères! Il pourrait arriver même que nous en ayons le vertige! Comment recommencer à vivre? On dit que bien des choses ne seront plus comme avant. Mais alors comment nous faudra-t-il être? À quoi faut-il nous attendre?
Pour l’essentiel, nous serons confrontés aux mêmes défis. Nous avons hâte de retrouver nos amis, nos proches. Les nécessités de la vie nous ramèneront vite les pieds sur terre. Comment seront nos prochaines rencontres par-delà le virtuel où nous en étions réduits depuis trois ou quatre mois? Nous retrouverons des personnes à portée de voix et de regards. Peut-être serons-nous intimidés? Peut-être avons-nous peur?
Aurons-nous des yeux neufs pour voir les gens? Oserons-nous maintenant nous rendre accessibles malgré les deux mètres obligés? Serons-nous maintenant capables de l’émerveillement et de l’admiration dont peut-être nous avions perdu le sens? Comment allons-nous gérer l’obsession commune, à bon droit cultivée, du damné virus?
Et s’il s’était produit en nous – pendant cette longue période – un décantage, une sorte de purification? Les épreuves, nous le savons, nous amènent à distinguer l’important de ce qui ne l’est pas, le permanent du transitoire, l’inutile du nécessaire! Allons-nous simplement retrouver nos amis et nos proches tels qu’avant ils étaient? Là même où nous en étions avec eux avant notre isolement? Ou bien nous seront-ils devenus plus chers, plus nécessaires, plus importants? Saurons-nous voir maintenant avec miséricorde et bienveillance ce que nous ne voulions pas voir ou ne pouvions pas voir chez eux auparavant?
Bien sûr, il y a eu les deuils, les pertes, les séquelles négatives de cette pandémie, tout le lot des souffrances qu’elle nous a causées. Il y a tout ce que nous avons perdu. Et nous n’en mesurons peut-être pas tout de suite l’ampleur et l’importance. Mais la vie continue! La colère, le déni et le découragement ne nous serviraient de rien. Pas plus que l’insouciance, la légèreté et le cynisme ne seraient des attitudes responsables devant le danger que représente la pandémie. Vite, tournons-nous plutôt avec prudence et bienveillance vers ceux et celles que nous retrouverons bientôt, qui nous attendent; sachant apprécier encore et plus que jamais les valeurs précieuses de la vie, de l’amitié, de la fidélité. Ce langage, malgré certaines réserves toujours nécessaires, sera maintenant davantage à notre portée. Profitons-en bien!
N’oublions pas la grâce de cette pandémie, car il y en a sûrement une! Comme de toutes les expériences fortes qui nous arrivent, nous pouvons en tirer quelque chose de profitable pour la suite. Déjà ce n’est pas rien que d’avoir pu traverser la tempête. Le courage et la patience dont nous avons fait preuve ont affiné nos âmes et consolidé notre force intérieure. Ils nous ont révélé le charme et la beauté du monde. Nous avons maintenant une chance renouvelée de vivre, d’aimer, de rêver ensemble d’un monde meilleur et d’y contribuer davantage pour notre part. N’est-ce pas là un appel à retrousser nos manches et à réaliser ensemble quelque chose de ce paradis vers lequel nous allons et que nous laisse entrevoir déjà Celui qui est plus grand que nous?
Jacques Marcotte, O.P.
Québec