Pierre m’aimes-tu ? Cent fois Je t’aime!
L’Évangile nous raconte une histoire de pêche ce matin, assortie d’une belle histoire d’amour. Une histoire de pêche qui commence comme celles que nous avons peut-être connues nous-mêmes, quand parfois nous sommes revenus bredouilles, un peu frustrés, peut-être gênés d’en parler, honteux d’avouer que nous avions perdu notre temps, que nous n’avions rien pris. Une histoire de pêche mal partie donc, mais qui, ici, s’achève en beauté, avec un aboutissement qui va au-delà de toute espérance.
Un dialogue d’amour, en plus, qui nous rappelle ces fois où peut-être nous avions du mal à dire nos sentiments, à exprimer notre réelle affection pour telle personne, cherchant à discerner notre réel penchant, alors que justement nous n’étions pas assez certains d’aimer assez, d’aimer vraiment.
En fait nous retrouvons Simon Pierre et les autres disciples dans un temps indéterminé d’après Pâques, qui était le leur, qui peut être aussi le nôtre. Ils sont retournés là-bas sur le Lac, là d’où ils venaient. Le Seigneur qui les avait choisis, leur avait donné rendez-vous en cet endroit, là où jadis il leur avait dit qu’il ferait d’eux des pêcheurs d’hommes.
C’est en fait de leur mission qu’il s’agit maintenant, d’eux qui sont partis à la pêche cette fois-là dans la nuit, partis pour la mission de l’Église, aller sauver leurs frères humains des eaux troubles et profondes du péché et de la mort. Or, cette nuit-là, ils n’ont pas connu le succès escompté. Vivaient-ils alors pour nous une sorte de parabole?
À les voir aller, nous comprenons que ça ne va pas bien quand nous sommes réduits à nos pauvres moyens. Avec la présence et la Parole du Maître, il en est autrement. Le Ressuscité guide ses envoyés vers les bons endroits et il assure la fécondité de leurs efforts. Soyons donc attentifs nous aussi. Jésus vient au bon moment nous relancer pour que notre mission – qui est la sienne – porte du fruit en abondance. Saurons-nous le reconnaître sur le Rivage et suivre ses consignes?
Considérons que le Seigneur a préparé pour les siens un déjeuner paisible et réconfortant sur le rivage, ce rivage qui est déjà terre nouvelle, espace de liberté et monde nouveau : il nous offre le repas de son eucharistie, qui nous réchauffe le cœur et nous fortifie, qui nous établit en intime relation avec lui, en communion les uns avec les autres.
C’est dans ce contexte d’un repas partagé avec lui que nous laisserons le Seigneur nous interpeler sur la vérité de notre affection pour lui, de l’amour qu’il met lui-même en nous pour que nous puissions nous aimer les uns les autres.
À nous aussi il pose la question qui pesait si lourd pour Simon Pierre. Elle devient aussi notre tourment : Toi, m’aimes-tu? Et nous vient la réponse, parfois évidente, souvent hésitante : Bien oui, Seigneur, tu sais bien que je t’aime. – Alors, prend soin de mes brebis, de mes amis, de ton frère, de ta sœur, nous répète Jésus. Voilà ce qu’il attend de nous. Trois fois, dix fois, cent fois, il nous demande : Est-ce que tu m’aimes? Parce que là est l’enjeu et le sens de notre vie. Aimer. Être aimé. Comme lui-même nous a aimés, jusqu’à donner sa vie. « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés », c’était son insistance!
En cette eucharistie, rendons grâce pour la présence généreuse, amoureuse et tellement mystérieuse du Seigneur ressuscité dans notre Assemblée. Laissons-nous apprivoiser et nourrir par lui, et entrons personnellement dans le régime de confiance, d’amitié, d’amour et de don, dans lequel le Seigneur nous appelle à le suivre. « Toi, suis-moi! »