Les premiers missionnaires chrétiens qui arrivèrent dans le royaume de Buganda étaient des anglicans; c’était en 1877. En 1879, les Missionnaires d’Afrique établirent leur première mission dans ce qui deviendra quelques années plus tard, après la conférence de Berlin qui en 1885 partagea l’Afrique entre les diverses puissances coloniales européennes, la colonie britannique de l’Ouganda.
Le roi Mutesa qui accueillit ces premiers missionnaires chrétiens était très ouvert à leur message et rapidement plusieurs communautés chrétiennes, anglicanes et catholiques, furent fondées; les premiers baptêmes catholiques eurent lieu en mars 1880. Le successeur de Mutesa, son fils Mwanga, adopta une attitude différente, hostile à ces nouveaux venus et à leur religion. A sa cour, il devait y avoir plus de 500 chrétiennes et chrétiens. Le roi commença néanmoins une vraie persécution contre les communautés chrétiennes, refusant en particulier leur morale qui s’opposait à la pédophilie. Cela aboutit au martyre d’une centaine d’entre eux dans les années 1885 et 1886, culminant en juin 1886 avec le martyre de plus d’une vingtaine d’autres, dont leur catéchiste Charles Lwanga jusqu’au jeune Kizito, encore un enfant, mais qui ne voulut pas être séparé des autres et demanda hâtivement le baptême pour subir le même sort. Parmi eux, il y avait des catholiques et des anglicans, mais aussi sept païens et un musulman, tous unis dans le témoignage du sang.
Sur la colline où la plupart d’entre eux ont été tués, il y a deux sanctuaires : le premier catholique, est majestueux et imposant, alors que le deuxième, protestant, est tout humble et discret. Le sanctuaire anglican occupe un petit espace à l’est de la colline; les cendres des martyrs, qui ont tous été brûlés, ont été recueillies et placées dans un petit reliquaire dans l’autel de cette minuscule chapelle, aux allures bien britanniques. Juste à côté, on a érigé un monument commémoratif au réalisme frappant : la plupart des martyrs avaient été solidement attachés dans une sorte de rouleau de bambou et placés les pieds dans le feu! C’est impressionnant quand on sait qu’ils continuèrent, durant leur supplice, à chanter les louanges de Dieu.
Le sanctuaire catholique est imposant. L’église, avec sa structure visible de tuyaux d’acier recouverts d’une couronne de béton, est ronde, et ici aussi, juste devant l’autel, dans une petite ampoule, ont été déposées des cendres des martyrs. Plusieurs d’entre eux, avant que l’on brûle leurs corps, furent massacrés avec des lances et des épées. On raconte qu’après cette tuerie, les soldats et les bourreaux du roi allèrent laver leurs armes dans le marécage voisin. Maintenant, on y a aménagé un petit lac au milieu duquel, sur une petite presqu’île, on a dressé l’autel principal utilisé lors des grandes occasions. Ce petit lac est sacré. Il est facile dans la foi de voir le sang des martyrs qui rejaillit encore sur toute l’Afrique!
Tous les ans, le 3 juin, on fête ces martyrs d’Ouganda. En provenance même des pays voisins, le Congo, le Kenya, le Rwanda, etc., des millions de pèlerins viennent honorer leurs martyrs. Le père Fredrick ajoute qu’en juin 2005 la police a estimé la foule à près de quatre millions de personnes. Le sang des martyrs est une semence de chrétiens, disait un auteur chrétien aux premiers temps du christianisme. Si l’Afrique est actuellement le continent qui se christianise le plus rapidement, n’est-ce pas aussi à cause de ses martyrs? Quand, le 3 juin, avec l’Église universelle nous célébrerons la fête des saints martyrs ougandais, pensons spécialement à ce continent, certes le plus meurtri et humilié du XXe siècle, et demandons à ses saints de faire grandir dans notre monde la justice, la paix, le pardon et la réconciliation.