Initier la Paix
Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 22,34-40.
En ce temps-là, les pharisiens, apprenant qu’il avait fermé la bouche aux sadducéens, se réunirent,
et l’un d’entre eux, un docteur de la Loi, posa une question à Jésus pour le mettre à l’épreuve :
« Maître, dans la Loi, quel est le grand commandement ? »
Jésus lui répondit : « ‘Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit.’
Voilà le grand, le premier commandement.
Et le second lui est semblable : ‘Tu aimeras ton prochain comme toi-même.’
De ces deux commandements dépend toute la Loi, ainsi que les Prophètes. »
COMMENTAIRE
Ça fait du bien d’entendre des paroles d’amour et de compassion comme celles qui nous sont proclamées ce matin : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur … Tu aimeras ton prochain comme toi-même. » « Vous étiez vous-mêmes des immigrés en Égypte… Vous n’accablerez pas la veuve et l’orphelin … Si tu prends en gage le manteau de ton prochain, tu le lui rendras avant le coucher du soleil… c’est la seule couverture qu’il ait pour dormir. » Ces appels nous sont lancés alors que nous sommes encore choqués, tourmentés peut-être, par les évènements graves et dévastateurs qui surviennent en bien des milieux touchés par des actions terroristes.
Nous avons ressenti jusque chez nous ce climat de panique et de peur, de violence et de mort qui est si fortement répandu en certains coins du monde. Nos dirigeants nous assurent qu’ils prennent tous les moyens pour que n’arrivent pas chez nous les attaques et les attentats. Il faut se protéger contre ces jeunes convertis qui se radicalisent, disent-ils, non, les terroristes n’auront pas le dessus. Et nous nous croyons justifiés d’y aller plus fort encore avec les armes et la guerre. Il faut aller combattre là-bas l’État islamique tout en surveillant davantage les allées et venues des loups solitaires prêts à semer chez nous la terreur. On finira bien par gagner cette guerre, pensons-nous. Rien n’est moins sûr. Le risque est trop grand de perpétuer ainsi l’inquiétude, la colère, la violence et la mort.
La parole de Dieu aujourd’hui suggère avec force une autre orientation de nos mentalités et de nos attitudes. Son message porte une option, risquée sans doute, mais qui nous propose à tous un virage audacieux du côté de l’amour, du côté du cœur et de la compassion. Un virage radical. Une invitation pressante à nous convertir. Sans négliger, bien sûr, la prudence élémentaire et les mesures de protection nécessaires, plus que tout il faut oser la confiance, une vie juste et honnête, l’amitié même. Il faut briser par le respect, la bonté et la douceur le cercle infernal du mépris, de la haine et du désir de vengeance.
Les principes de la vie morale chrétienne, tout comme ceux prônés par l’Islam et les autres religions, tendent à la perfection de la justice et de l’amour. Nous n’avons certes pas le monopole de la bonté. C’est une valeur humaine universellement prisée et répandue. Mais il est certain que nous avons des raisons nouvelles et la mission bien spéciale de faire grandir l’amour fraternel sur la terre. La révélation apportée par le Christ nous entraîne en ce sens. Il nous a tracé le chemin du plus grand amour, non seulement par ses paroles mais aussi par le témoignage de sa vie donnée et de sa Pâques. Il y a là une source immense d’espérance, la promesse d’une victoire certaine.
Et nous avons la responsabilité d’être témoins de cette merveille d’amour et de fidélité, de miséricorde, de rédemption et de paix véritable en nous engageant à la suite du Christ sur ce chemin d’Évangile. La compassion, la justice, le partage, l’amour fraternel, ce sont là les manières d’être et de vivre l’Évangile du Christ, des manières désormais gagnantes et contagieuses parce que marquées de la victoire du Christ, notre Sauveur.
Tournons-nous radicalement avec lui vers les petits et les pauvres, et la paix viendra dans le monde : « Si le pauvre – que tu as lésé – crie vers moi, je l’écouterai, car moi, je suis compatissant! » dit le Seigneur.