L’étonnant Mystère !
Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 6,51-58.
Après avoir nourri la foule avec cinq pains et deux poissons, Jésus disait : « Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour que le monde ait la vie. »
Les Juifs discutaient entre eux : « Comment cet homme-là peut-il nous donner sa chair à manger ? »
Jésus leur dit alors : « Amen, amen, je vous le dis : si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n’aurez pas la vie en vous.
Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour.
En effet, ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson.
Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi je demeure en lui.
De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même aussi celui qui me mangera vivra par moi.
Tel est le pain qui descend du ciel : il n’est pas comme celui que vos pères ont mangé. Eux, ils sont morts ; celui qui mange ce pain vivra éternellement. »
COMMENTAIRE
Un dimanche pour contempler l’humble mystère d’amour et de don que représente l’Eucharistie. Cette pratique deux fois millénaire nous étonne encore. Pourtant, elle est notre force. Elle nous fait vivre. Elle nous établit en sainte communion avec Dieu et entre nous. Pourquoi aurions-nous encore des résistances et des peurs face à l’Eucharistie? Elle est pour notre guérison. Si seulement nous tenons pour vrai que l’Eucharistie nous annonce Pâques, qu’elle proclame la Seigneurie du Christ sur le monde et dans les cœurs? Elle met en œuvre la puissance divine pour notre relèvement, notre réconciliation avec Dieu, avec nous-même, avec notre prochain.
La Fête-Dieu a toujours été chez nous une fête populaire, une fête de proximité. Dieu circulant dans nos rues et nos rangs, à la campagne comme dans la ville. Dieu tout proche, qui marche avec nous. Il nous rejoint au cœur de ce qui fait notre vécu quotidien. Cette belle fête nous rappelle que le Seigneur a voulu passer par chez nous. Il ne vient pas vers nous autrement qu’en épousant nos conditions de vie parfois dures et difficiles.
Déjà cette alliance est figurée bien physiquement dans un des éléments constitutifs du rite de l’Eucharistie. L’usage que nous faisons du pain. Le pain qui vient de la terre et du travail de nos mains.
Le pain de l’autel n’est-il pas intimement lié à ce pain que nous partageons au soir de nos labeurs, ce pain parfois si rudement gagné, ce pain qui heureusement ne manque pas sur nos tables, ce pain, qu’il a fallu fabriquer. Ce pain, il a toute une histoire!
Pensons aux travaux de labour, à ceux des semailles, à la croissance et au lent mûrissement des blés. Rappelons-nous la corvée des récoltes et des engrangements, les étapes du « battage », pour extraire le froment, puis de la mouture qui produit la farine dont on fait une pâte que le boulanger confie à l’action transformante du feu.
Pensons à ce feu, apprivoisé, à cette intense chaleur qui s’en dégage, qui pénètre la pierre. Elle s’y emprisonne. Puis lentement elle s’en libère. La chaleur passant de la pierre à la pâte, elle fait lever celle-ci, qui s’achève en un pain croustillant. Il goûte bon, ce pain, il nourrit l’âme et le corps. Il devient en nous énergie nouvelle !
Voici que ce même pain se prête à une autre transformation. Toutes les étapes évoquées, depuis la germination du grain jusqu’au pain sur la table, préparaient ce moment d’ultime achèvement : notre pain devenu matière pour Dieu, pain de Dieu donné pour la vie du monde. Ce pain pour Dieu, ce pain de la Fête-Dieu, nous l’avions en réserve depuis longtemps. Nous en avions faim. Pour nourrir l’homme et la femme de sa substance, le Seigneur assume le pain de nos repas. L’action de grâce en mémoire du Christ va désormais reprendre en l’autre sens le parcours qui nous a donné le pain. C’est l’Eucharistie sanctifiante, fortifiante, génératrice de vie et d’amour.
Chacun et chacune de nous, à notre manière, portant notre lot de rêves, de joies et de misères, n’avons-nous pas mis la main à la pâte, pour, à la fin, mettre la table pour Dieu, pour avec notre pain donner chair et sang à notre Dieu, devenu en son Fils Pain de vie pour nous tous.