Lundi 15 avril, 15 h. Boston est en liesse. Un grand marathon réunit des gens de partout : des coureurs et des spectateurs de tous les âges, depuis les bébés dans les bras de leur mère jusqu’aux ancêtres qui viennent applaudir les sportifs. La fête est au rendez-vous.
15 h 45. Une bombe éclate tout près du fil d’arrivée. Treize secondes plus tard, une deuxième déflagration. Panique. Cris et hurlements. Pleurs. Courses en tout sens. Beaucoup de blessés. Trois morts, dont un garçon de huit ans. Finie la fête. Finies les réjouissances. Pendant que les uns s’occupent des blessés, d’autres enregistrent les indices qui mèneraient à l’arrestation de ceux qui ont signé le méfait.
Qui a osé commettre cet attentat? Pourquoi? Le mystère règne pendant quelques jours. Puis, on identifie deux suspects. Armés jusqu’aux dents. L’un est tué; l’autre échappe à la police. Il n’a pas encore été trouvé au moment où je rédige ce billet.
Nous sommes bouleversés. L’Amérique est dans l’angoisse, profondément. L’Amérique et le reste du monde. Comme le 11 septembre 2001, c’est toute la planète qui tremble devant le terrorisme.
Le coup est dur pour nous. L’attentat a eu lieu à quelques kilomètres de chez nous. Il nous brasse la cage fortement. Mais quand cela se produit à Bagdad ou à Mossoul, au Caire ou dans le sud de la Syrie, nous sommes moins atterrés. Nous recevons la nouvelle comme si la chose était normale. Ici, c’est une tragédie; là-bas, c’est une vieille habitude.
La télé et l’internet nous lancent chaque jour des images de guerre et de violence. Nous les recevons calmement. Les cinémas nous proposent des films horrifiants doucement classés : «films d’action». Ainsi, ils affichent moins l’horreur, le macabre, notre goût des émotions fortes. La violence est devenue banale. Comme l’exprimait si justement Robert Kennedy à la mort de Martin Luther King :
«Certains sont à la recherche de boucs émissaires, d’autres de complots, mais ce qui est sûr en tout cas, c’est que la violence engendre la violence, que la répression entraîne des représailles, et que seule la purification de notre société tout entière pourra ôter cette maladie de notre âme.» (Cité par Timothy Radcliffe, dans Pourquoi aller à l’église?, Paris, Cerf/Champs essais, 2008, p. 176)
Le vingtième siècle a été marqué par des horreurs tout au long de son parcours. La guerre a tué des humains. Le terrorisme a engendré la peur, l’angoisse, comme jamais dans les siècles précédents. Pouvons-nous espérer que le siècle suivant soit différent? Pouvons-nous espérer bâtir un monde où la violence cède la place à la paix et au respect? Que l’être humain ne soit plus un loup pour l’être humain?