Mon pays est envahi par l’hiver. Un vrai hiver. Il fait tellement froid que nous avons l’impression de battre les records de la Sibérie! La glace sur les rues et les trottoirs est sournoise. Les vents sont cinglants. Heureusement, les paysages sont lumineux. Le soleil darde ses rayons sur la neige et atténue l’impression de vivre au Pôle Nord.
Des québécois raffolent de l’hiver. J’appartiens à cette horde d’hurluberlus. Nous ne sommes pas très nombreux cependant. Européens d’origine, nous vivons en Amérique du Nord depuis plusieurs siècles. Mais nous consentons difficilement au climat du continent. Nous avons toujours peur de nous faire geler les oreilles. Nous ne savons pas nous habiller en conséquence. Je voyais hier un garçon de dix ou onze ans en bermudas, les jambes à la merci du froid glacial. À trois heures d’une pneumonie!
Beaucoup, surtout parmi les personnes âgées, entrent en hibernation, comme les ours, lorsque novembre se pointe du nez. Ils mettent leurs géraniums à l’abri. Ils font poser leurs châssis-doubles. Résignés, ils entreprennent une longue saison de solitude. Avec pour principal délassement quelques rhumes de cerveau et une bonne grippe. Ils passeront une grande partie de leurs longues journées devant leur téléviseur. Ils jetteront un coup d’œil par la fenêtre en espérant que passent quelques courageux fantômes des neiges qui les distrairont un instant.
L’hiver a ses victimes. Durant l’été, les rencontres sont faciles. Ce n’est pas le cas en hiver. Ne faudrait-il pas apprendre à inventer des distractions, à favoriser des rencontres. Bref, apprendre à utiliser les côtés positifs de la «mauvaise» saison. À utiliser aussi les côtés négatifs, pour les vivre comme des défis à relever. Mais, de grâce, ne cédons pas à la résignation.
Gilles Vigneault chante : «Mon pays, ce n’est pas un pays, c’est l’hiver…» J’ajouterais : «Mon hiver, ce n’est pas un hiver, c’est chaleur, lumière, rencontre, partage, soutien… et combien d’autres trésors qui donneraient à nos hivers des allures d’été.