Etes-vous prêts à avoir un enfant ? Voilà la question affichée sur un magazine il y a peu. La question semble légitime. Il faut sans doute se la poser. Quoique… Ne se pose-t-on pas trop de questions justement aujourd’hui.
Il est vrai qu’aujourd’hui, tout a changé. La place de l’enfant n’a plus rien à voir avec ce qu’elle représentait ne serait-ce qu’il y a cent ans. Autrefois, avoir un enfant relevait de la nécessité. Pour les ruraux, l’enfant était une force vive qui viendrait aider au travail de la ferme. Pour le citadin déjà, c’était moins crucial, mais l’artisan, le marchand souhaitait bien une relève, une reprise de ses affaires. Donc, la question ne se posait peut-être pas, il fallait avoir un enfant.
Dans un tel contexte, pouvait-il naître de la poésie sur l’enfance ? Depuis longtemps pourtant, dès les psaumes, l’image de tendresse de l’enfant est évoquée « comme un enfant contre sa mère ». Dans les peintures, dans les poèmes les plus anciens, l’amour profond que suscite un enfant surgit. La nature a pourvu le petit enfant profondément attachant. Il valait mieux pour sa survie d’ailleurs. L’enfant vient depuis toujours nous chercher le coeur. Jésus lui-même disait « laissez venir à moi les petits enfants… »
Mais voilà, l’enfant n’est plus « utile » pour une famille. Il n’est plus considéré comme de futurs bras pour la terre. C’est certes heureux qu’il ne soit plus mis au monde pour des raisons utilitaires, mais depuis la question se pose : pourquoi vouloir un enfant ?
Quand les jeunes couples désirent mettre en route une famille, on fait valoir que ça coûte cher un enfant ! Faut bien y penser avant d’en mettre un en route ! La société elle-même voit dans l’enfant un futur chômeur. C’est un poids pour la société un enfant ! Voyez comme le contexte a changé ! Pourtant, on prend le problème à l’envers. Bien sûr qu’il faut mettre un enfant au monde dans des conditions de vie décente.
Mais pourquoi aujourd’hui mettre un enfant au monde ? L’enfant ne doit être ni un objet de consommation (bien que la société de consommation y a un créneau bien taillé), ni un objet de luxe, et encore moins un objet de convoitise. L’enfant est un fruit, le fruit de l’amour. Aimé pour lui-même et miroir de l’autre que j’aime tant, tellement qu’on a voulu ouvrir cet amour sur l’autre.
L’enfant, c’est l’autre qui évite l’implosion au couple. On repart dans l’enfant utilitaire de la sphère psychologique penserez-vous ? Loin de là, car on ne le sait pas, en le mettant au monde ce petit qui nous sauve de l’égocentrisme conjugal. Grâce à lui, le couple s’ouvre sur le don, le dépassement, le dévouement. Car l’enfant ne chôme pas : il a faim, veut être changé, est parfois malade, veut bouger et il a perpétuellement besoin de nous. Devrait s’enclencher alors une formidable solidarité conjugale afin de pourvoir aux besoins du bébé. L’amour engendre l’amour et le génère. L’enfant, c’est à la fois un bout de paradis sur terre et un chemin de sanctification nous menant au paradis ! Il est le cadeau de Dieu offert à notre pauvre condition humaine.
Aujourd’hui mettre un enfant au monde ne tient plus de la raison. C’est un acte d’amour irréfléchi, du même acabit que celui qui nous jette dans les bras de celui qui deviendra notre futur époux. Arrêtons de raisonner. Il y a-t-il des moments dans notre vie où l’on peut dire qu’on est prêt à accueillir un enfant ? La réponse est non ! On n’est jamais prêt, car accueillir un enfant est un immense bouleversement dans une vie. Même au 8e. Désirer un enfant c’est de l’ordre du cœur et c’est même déraisonnable. Bien malin qui trouvera une raison au 21 e siècle pour le mettre au monde. Mais quand je regarde ma petite dernière de 4 ans, je suis bien heureuse d’avoir manqué de raison.
Vouloir un enfant, c’est en quelque sorte croire en la vie, au futur et à l’amour. C’est un acte de foi et d’espérance. Mon fils aîné m’annonçait la semaine dernière, ému, qu’un de ses amis allait être papa. Et j’ai senti dans son regard une pointe d’envie, un désir qui soudain se profilait. Il n’y a pas de raison à l’amour… Et l’amour désire se perpétuer dans l’espérance.