Demeurez en moi, comme moi en vous !
À l’heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples : « Moi, je suis la vraie vigne, et mon Père est le vigneron.
Tout sarment qui est en moi, mais qui ne porte pas de fruit, mon Père l’enlève ; tout sarment qui donne du fruit, il le nettoie, pour qu’il en donne davantage.
Mais vous, déjà vous voici nets et purifiés grâce à la parole que je vous ai dite :
Demeurez en moi, comme moi en vous. De même que le sarment ne peut pas porter du fruit par lui-même s’il ne demeure pas sur la vigne, de même vous non plus, si vous ne demeurez pas en moi.
Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là donne beaucoup de fruit, car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire.
Si quelqu’un ne demeure pas en moi, il est comme un sarment qu’on a jeté dehors, et qui se dessèche. Les sarments secs, on les ramasse, on les jette au feu, et ils brûlent.
Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que vous voudrez, et vous l’obtiendrez.
Ce qui fait la gloire de mon Père, c’est que vous donniez beaucoup de fruit : ainsi, vous serez pour moi des disciples.
COMMENTAIRE
La parabole que Jésus emploie dans l’évangile de ce dimanche nous invite à réfléchir sur la vérité de notre vie de croyant. Être chrétien consiste à vivre dans une grande union avec le Christ. D’une certaine façon, Paul résume l’enseignement de Jésus en écrivant : « Désormais, ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi ! » (Ga 2,20). Le chrétien est donc habité par un Autre, quelqu’un qui vit en grande intimité avec Dieu. Il ne se situe pas d’abord devant Dieu ou en présence de Dieu qui lui serait extérieur et devant qui il aurait à se prosterner la face contre terre. Le chrétien abrite Dieu en lui : « Demeurez en moi comme moi, je demeure en vous ! »
La parabole de la vigne vient illustrer cet aspect très important de la vie de tout baptisé. Nous sommes comme les sarments d’une vigne. Le cep de la vigne, c’est le Christ, et nous sommes les sarments. Chacun de nous est donc intimement lié au Christ ; nous recevons de lui la sève de la vie divine qui nous permet de donner le fruit attendu par le vigneron qui n’est autre que Dieu le Père. Nous portons le fruit attendu si la vie du Christ nous traverse, c’est-à-dire si nous sommes unis à lui : « De même que le sarment ne peut pas porter de fruit par lui-même s’il n’est pas sur la vigne, de même vous aussi si vous ne demeurez pas en moi. » Les textes de ce dimanche nous proposent plusieurs moyens de vivre unis au Seigneur dans notre vie quotidienne.
Nous sommes unis à Jésus quand ses paroles demeurent en nous. Avons-nous une Bible et la lisons-nous régulièrement ? Utilisons-nous la Parole de Dieu pour prier ? La lire est déjà bien ; pourtant, dans le passage de sa première épître (2e lecture), saint Jean précise que la Parole de Dieu doit surtout être pratiquée ! « Nous devons nous aimer non pas avec des paroles et des discours, mais par des actes et en vérité ! » Notre vie sera véritablement chrétienne si nous mettons en pratique le commandement de l’amour que Jésus nous a donné et qui consiste à « nous aimer les uns les autres comme il nous l’a commandé ».
« Ce qui fait la gloire de mon Père, c’est que vous donniez beaucoup de fruit, c’est ainsi que vous serez pour moi des disciples. » Quel est donc le fruit que le Père attend de nous sinon celui de l’Esprit ? Saint Paul dans son épître aux Galates écrit que le fruit de l’Esprit consiste en « charité, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité » (Ga 5,22). Nous ne pourrons produire ce fruit qu’en étant unis à Jésus : « En dehors de moi, vous ne pouvez rien faire ! » C’est l’Esprit Saint qui réalise cette union au Christ Jésus au plus intime de nous-mêmes.
En effet, être uni à Jésus consiste à accueillir en soi le Saint Esprit. Saint Jean ne disait-il pas que « nous reconnaissons que Dieu demeure en nous parce qu’il nous a donné son Esprit » (1Jn 4,13) ? En ce temps pascal qui se termine par la grande solennité de la Pentecôte, invoquons souvent le Saint Esprit car, selon les mots de Paul aux Romains, « l’amour a été répandu dans nos cœurs par le Saint Esprit qui nous a été donné » (Rm 5,5). Ce que Luc écrit dans les Actes des Apôtres pour l’ensemble de l’Église est aussi vrai pour chaque chrétien qui a besoin de « l’assistance de l’Esprit Saint » !
Vue sous cet angle, la vie chrétienne est une vie active parce qu’elle est spirituelle ! C’est l’Esprit Saint qui nous aide à mettre vraiment en pratique le commandement de l’amour et à porter ainsi le fruit que Dieu attend de nous. Sans le Saint Esprit, nous risquons d’être des sarments desséchés qui devront être coupés puis jetés et brûlés. Laissons-nous donc travailler par la grâce du Seigneur, par le Saint Esprit, pour porter le beau raisin attendu par le Vigneron. Être chrétien nous demande à renoncer à tout ce qui pourrait nous séparer du Seigneur pour être fidèles à sa Parole avec l’aide du Saint Esprit.
Ne mettons pas le Saint Esprit à la porte de nos cœurs ! Nous risquerions de nous retrouver séparés du Christ ! Renonçons donc à tout ce qui pourrait détruire notre communion avec le Christ. Car si nous sommes unis au Christ par le Saint Esprit, « nous aurons le cœur en paix ; notre cœur aurait beau nous accuser, Dieu est plus grand que notre cœur ! » Le fruit de la vigne, c’est aussi le raisin avec lequel on produit le vin. Le Saint Esprit rend possible aussi ce grand mystère de l’Eucharistie où se réalise cette parole de Jésus : « Demeurez en moi comme moi en vous ! »
Frère François-Dominique CHARLES, o.p.