Le carême vient de commencer. Les chrétiens sont entrés dans un temps fort de l’année liturgique. Quarante jours et quelques dimanches dans une sorte de désert spirituel qui évoque le long voyage de quarante ans du peuple de Dieu vers la Terre promise. Il rappelle aussi les quarante jours d’épreuve de Jésus après son baptême, avant sa tournée de prédication.
Cela ne signifie pas pour autant que le programme du carême relève de l’exploit, comme parfois on le pense. Ce n’est pas le temps de se lancer dans les grandes performances spirituelles. Trois activités sont à l’honneur : la prière, le jeûne et le partage. Jésus les propose dans ce que nous appelons le «sermon sur la montagne» avec une consigne bien précise : agir dans le secret du cœur. «Ton Père voit ce que tu fais en secret : il te le revaudra.» (Matthieu 6, 1-6.16-18)
Le but de tout cela : changer le cœur pour le rendre disponible à l’événement de Pâques qui sera fêté au bout des quarante jours. Le carême est donc un temps pour cultiver la joie qui culminera dans la plus grande fête de l’année. «Le carême chrétien est une préparation à recevoir la vie nouvelle que Dieu donne aux croyants par la mort et la résurrection de Jésus.» (Mgr Pierre de Claverie, o.p.)
Pouvons-nous dire que le carême est le ramadan des chrétiens? Et vice versa, pouvons-nous penser que les musulmans font carême durant le mois du ramadan? L’un n’équivaut pas à l’autre, loin de là.
Les musulmans consacrent un mois de l’année à jeûner du lever du soleil jusqu’à son coucher : pas de nourriture, pas de boisson, pas de rapport sexuel. Le Coran prescrit le ramadan mais il n’en donne pas de signification. Le ramadan n’aboutit pas à une fête particulière comme la Pâque des chrétiens. Les musulmans le pratiquent essentiellement par obéissance à la loi divine.
Les disciples de Mahomet jeûnent le jour mais ils se reprennent la nuit : «Comme il ne s’agit pas d’une activité pénitentielle, cette rupture du jeûne donne lieu à des repas améliorés où l’ambiance rappelle celle du réveillon de Noël.» (P. Jean-Marie Gaudeul)
Parfois, le ramadan peut être l’occasion d’un réveil spirituel. «Le Coran a été révélé durant le mois de Ramadan. C’est une Direction pour les hommes; une manifestation claire de la Direction et de la Loi.» (Coran 2, 185) On fait mémoire d’un événement spécial vers la fin du ramadan : la Nuit du Destin. Elle rappelle que la Révélation a été donnée ce jour-là, quelque chose qui ressemble à notre nuit de Noël où le Fils de Dieu est né. Le souvenir de ce don du ciel peut amener les musulmans à faire du ramadan un temps fort de méditation du Coran.
Le ramadan n’est donc pas le carême et le carême n’est pas le ramadan. Mais l’un comme l’autre peuvent être l’occasion de nous porter mutuellement dans la prière et le respect.