1. Chantez au Seigneur (YHWH) un chant nouveau,
chantez au Seigneur, terre entière,
2. chantez au Seigneur et bénissez son nom !
De jour en jour, proclamez son salut,
3. racontez à tous les peuples sa gloire,
à toutes les nations ses merveilles !
4. Il est grand, le Seigneur, hautement loué,
redoutable au-dessus de tous les dieux :
5. néant, tous les dieux des nations !
Lui, le Seigneur, a fait les cieux :
6. devant lui, splendeur et majesté,
dans son sanctuaire, puissance et beauté.
7. Rendez au Seigneur, familles des peuples,
rendez au Seigneur la gloire et la puissance,
8. rendez au Seigneur la gloire de son nom.
Apportez votre offrande, entrez dans ses parvis,
9. adorez le Seigneur, éblouissant de sainteté :
tremblez devant lui, terre entière.
10. Allez dire aux nations : « Le Seigneur règne ! »
Le monde, inébranlable, tient bon.
Il gouverne les peuples avec droiture.
11. Joie au ciel ! Exulte la terre !
Les masses de la mer mugissent,
12. la campagne tout entière est en fête.
Les arbres des forêts dansent de joie
13. devant la face du Seigneur, car il vient,
car il vient pour juger la terre.
Il jugera le monde avec justice
et les peuples selon sa vérité !
À propos de ce psaume, Paul Claudel explique : « La louange est peut-être le plus grand moteur de la poésie parce qu’elle est l’expression du besoin le plus profond de l’âme, la voix de la joie et de la vie, le devoir de toute la création, celui en qui chaque créature a besoin de toutes les autres ». [In Œuvres en prose, coll. de la Pléiade, Paris, Gallimard, 1965, p. 63].
C’est l’univers entier qui est porté par le langage en « un cantique nouveau, un cantique (…) fait de toute la terre » (Ps 95,1). [In Paul Claudel, Psaumes (traductions 1918 – 1953), texte établi et annoté par Renée Nantet et Jacques Petit, coll. Blanche, Paris, NRF Gallimard 2008].
Les mots clés de ce poème
Le nom qui revient le plus souvent dans ce psaume (11 fois) est le tétragramme sacré « יהוה » que la Bible de Jérusalem transcrit « Yahvé » et que l’on peut également écrire « YHWH » pour exprimer le nom divin, qui est le Seigneur unique et transcendant qui se révèle dans l’histoire. La dignité humaine est de Le connaître comme sauveur (v.2d), créateur (v. 5b), comme saint (v.9a) qui règne (v.10a) et gouverne (v.10c, 13bc). Il est Celui qui vient au monde (v.13a) en vérité (v.13d). Le psalmiste invite impérativement tout l’univers à Le faire connaître (v.1-4.7-8.10) en toutes ses œuvres, à Le servir (v.8a) de manière unique, en un mot qui est réservé à Dieu : L’adorer (v.9) ! Ce psaume insiste ensuite (par 4 fois) sur « les peuples » (v. 3b.7a et 10c.13d) du monde et il s’adresse à toute « la terre » (1b.9b et 11a.13b).
Puisque le Seigneur est présent et que le croyant est appelé à dire qu’Il règne (v.10a), l’auditeur en déduira assez clairement que « le monothéisme hébraïque implique une vision unitaire du monde, dans le sens que toutes les réalités procèdent d’un Dieu un. » [In Philippe Haddad, Paroles de rabbins, Seuil, Paris 2010, p.129]
D’autres versets accentuent « la gloire » de Dieu (v.3a.7b.8a) et « son Nom » (v.2a, 8a), par contraste avec la double mention de « tous les dieux » (v.4b, 5a), pour établir clairement sa souveraineté. Le psalmiste invite donc à un culte universaliste du Nom glorieux de Yahvé.
La composition du psaume
Tous les verbes des versets 1-3 et 7-10a étant à l’impératif, à l’exception des versets 4-6 qui énoncent des motifs de louange, nous pouvons distinguer deux sections, reliées par leur sommet qui est la royauté de Dieu à l’œuvre (v.10a). Nous avons ainsi 1-10a et 10a-13, dont la première est un invitatoire hymnique à la royauté de Dieu et la seconde englobant l’univers du ciel et de la terre, de la mer et de la campagne avec les arbres de ses forêts appelées à se réjouir (v.11a, 12b), car Dieu les remplit de sa bonne gouvernance. Les compléments de « droiture » et de justice ou fidélité » s’équivalent (v. 10c et 13c). Il est celui qui va juger tous les peuples avec équité. Cette nouveauté de Dieu qui vient gouverner invite à la joie eschatologique (cf. Ps 33 ; 40 ; 98 ; 144) et fait de ce psaume un poème de la royauté de YHWH, à portée universelle et cosmique.
Le psaume 96 dans la Bible
Le psaume que nous présentons est probablement de la période (années 540-538 avant Jésus-Christ) qui précède le retour d’exil d’une partie du peuple juif à Babylone. C’est un « classique » dans les Écritures saintes, car son contenu est proche de nombreux autres psaumes et écrits bibliques. Non seulement à l’intérieur du psautier, en comparant certains versets des psaumes 29,1-2 ; 48,2 ; 93,1 ; 97,7 ; 98,1-2.7.9 ; 105,1 ; 145,3 mais également dans le cantique que reprend le premier livre des Chroniques (1 Ch 16,23-33). Saint Paul reprend, quant à lui l’esprit de ce psaume qui montre combien Dieu surpasse toutes les idoles et autres divinités dont les Corinthiens peuvent faire usage (1 Co 8,4-6) : elles ne sont qu’illusions ou des « riens » devant Dieu le Père de notre Seigneur Jésus le Christ. Jésus qui « règne par le bois de la croix », règne bien plus que « le bois » dont sont faites des idoles des hommes.
Dieu règne au-dessus des « dieux des nations » (v.5a) ou de tout autre « démon » et ce thème de la grandeur divine se retrouve fréquemment en Isaïe (Is 40,18-22). La gloire de son Nom (v.8a) est à bénir (v.2a) et son règne (v.10a) à proclamer ne sont pas sans rappeler l’enseignement de la prière de Jésus à ses disciples (Mt 6,9 ; Lc 11,2).
Dans la prière de l’Église
Le psaume 96 convient à la louange de la « nouveauté » de Dieu surgissant à Noël, c’est pourquoi il est proposé pour la messe de la nuit de Noël (année A). La proclamation au monde des merveilles de Dieu est encore rappelée le 2e Dimanche (A) et le 29e Dimanche (C). En considérant la victoire du Seigneur Jésus « Agneau immolé » qui réalise une nouvelle délivrance du peuple de Dieu par rapport à la délivrance d’Égypte chantée par Moïse et Myriam, les fidèles sont appelés à chanter le lundi matin (de la semaine 3) ce poème pour Dieu, roi et juge de l’univers. Ceci quelle que soient les difficultés politiques des gouvernants ou des forces en présence.
Dieu règne au-dessus des « dieux des nations » (v.5a) ou de tout autre « démon »
Ne vaudrait-il pas mieux écrire :
Dieu règne au-dessus des « dieux des nations » (v.5a) ou de tout « démon » ?