Nous ne perdons pas la foi et l’espérance
En ces jours-là, paraît Jean le Baptiste, qui proclame dans le désert de Judée : « Convertissez-vous, car le Royaume des cieux est tout proche. » Jean est celui que désignait la parole transmise par le prophète Isaïe : A travers le désert, une voix crie : Préparez le chemin du Seigneur, aplanissez sa route.
Jean portait un vêtement de poils de chameau, et une ceinture de cuir autour des reins ; il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage. Alors Jérusalem, toute la Judée et toute la région du Jourdain venaient à lui, et ils se faisaient baptiser par lui dans le Jourdain en reconnaissant leurs péchés.
Voyant des pharisiens et des sadducéens venir en grand nombre à ce baptême, il leur dit : « Engeance de vipères ! Qui vous a appris à fuir la colère qui vient ? Produisez donc un fruit qui exprime votre conversion,
et n’allez pas dire en vous-mêmes : ‘Nous avons Abraham pour père’ ; car, je vous le dis : avec les pierres que voici, Dieu peut faire surgir des enfants à Abraham. Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres : tout arbre qui ne produit pas de bons fruits va être coupé et jeté au feu.
« Moi, je vous baptise dans l’eau, pour vous amener à la conversion. Mais celui qui vient derrière moi est plus fort que moi, et je ne suis pas digne de lui retirer ses sandales. Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et dans le feu ; il tient la pelle à vanner dans sa main, il va nettoyer son aire à battre le blé, et il amassera le grain dans son grenier. Quant à la paille, il la brûlera dans un feu qui ne s’éteint pas. »
COMMENTAIRE
L’Avent est le temps de l’espérance parce que nous sommes certains, en raison de notre foi chrétienne, qu’il y a un Sauveur de notre humanité défigurée et que Dieu n’est pas indifférent à ce que deviennent les hommes sur la terre. Le Sauveur en qui nous croyons et en qui nous mettons toutes nos espérances, c’est Dieu lui-même qui a voulu tellement s’approcher de nous qu’il est devenu l’un de nous.
Oui, notre humanité est défigurée ! L’horrible massacre tout récent de 52 chrétiens dont deux prêtres dans la cathédrale Notre Dame du Perpétuel Secours à Bagdad est un drame qui nous rappelle trop que l’homme, même s’il est religieux, peut hélas être capable du pire. Les évêques irakiens des Chaldéens et des Syriens ont écrit un court message à leurs frères de France dans lequel on pouvait lire cette phrase étonnante : « Nous perdons la patience, mais nous ne perdons pas la foi et l’espérance. » Ce cri est bien celui des chrétiens, tout simplement parce que nous savons qu’envers et contre tout et malgré les apparences, il y a un « Sauveur du monde » (Jn 4,42), un « Sauveur de tous les hommes » (1Tm 4,10) qui vient pour renverser nos logiques humaines de mort et pour semer une grande espérance de vie. Mais actuellement, si, comme dit saint Paul, « nous gémissons dans l’attente de la rédemption » (Rm 8,23), nous gardons courage et « nous possédons l’espérance » car nous avons comme Dieu « le Dieu de la persévérance et du courage » (cf. 2e lecture).
Cette même espérance habitait déjà le prophète Isaïe qui attendait un tel Sauveur quand il dit : « le souffle de ses lèvres fera mourir le méchant. Justice est la ceinture de ses hanches ; fidélité, le baudrier de ses reins. Le loup habitera avec l’agneau… Il ne se fera plus rien de mauvais ni de corrompu sur ma montagne sainte… » (cf. 1ère lecture). Avec la venue de Jésus, le Royaume de Dieu est devenu proche… Il est déjà là en germe… Nous espérons sa pleine réalisation. Nous sommes en ce monde un peu comme Jean-Baptiste : nous annonçons la venue du Sauveur, nous découvrons sa présence et nous attendons qu’il paraisse pour transformer un monde qui ne veut pas de lui. Mais il est « plus fort » que nous tous ! Il vient nous baptiser dans l’Esprit Saint et le feu. Puisse-t-il souffler son Esprit de paix sur notre vieux monde où tant d’hommes, de femmes et d’enfants souffrent et peinent jusqu’à parfois perdre l’espérance. Que le feu de l’Esprit allume un incendie dans toute cette paille que sont la haine, la violence, l’égoïsme, les divisions, les guerres…
Être sûrs que le Sauveur va venir ne suffit pas pour hâter sa venue ; il convient de tout mettre en œuvre pour faciliter sa venue en aplanissant sa route partout où nous vivons : dans nos familles et nos communautés chrétiennes, dans nos lieux de travail et de vie sociale. Que chacun essaie d’être plus attentif et accueillant aux autres, plus souriant, proposant plus volontiers ses services. Peut-être pouvons-nous penser à réserver dans nos agendas des espaces de temps pour visiter des personnes malades, pour inviter chez soi des personnes que l’on a un peu oubliées ou qui sont délaissées… Peut-être pouvons-nous aussi réserver du temps pour lire la parole de Dieu et pour prier : « Seigneur, viens dans ma vie, viens dans la vie de mes proches, viens dans le cœur de tous ceux qui sont tentés de désespérer, viens partout où tu es attendu et partout où tu es ignoré, oublié, refusé… »
Souvenons-nous du conseil que saint Paul nous donne dans la 2e lecture : « Que le Dieu de la persévérance et du courage vous donne d’être d’accord entre vous selon l’esprit du Christ Jésus. » Hâtons donc la venue du Seigneur en recherchant à favoriser en tous lieux l’harmonie et la communion entre tous. C’est ainsi que, « d’un même cœur, d’une même voix », nous pourrons tous ensemble acclamer le Sauveur qui vient et « rendre gloire à Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ. »
Frère François-Dominique CHARLES, o.p.