Le roman de Frédérique Deghelt, La vie d’une autre, m’a complètement captivé.Un joli roman sur l’amour conjugal et sa tentative de traverser le temps avec cette étincelle, ce regard des débuts de l’amour. Aux lecteurs qui ne l’ont pas lu et qui en aurait l’intention, lisez le d’abord avant de poursuivre cet article, car le livre servira de propos tout au long de ces lignes!
Marie rencontre Pablo un soir de mai. Elle est littéralement envoûtée. Elle se réveille douze ans plus tard, sans aucun souvenir de ce qui s’est passé au cours de ces années qui la séparent de sa première rencontre avec celui qui est devenu son mari, et qui lui a donné trois enfants. Elle n’ose dire quoique ce soit à son entourage sur cette “absence”, cette amnésie. Elle n’a reçu aucun coup, aucun incident physique n’a pu provoquer une telle perte de mémoire.
Le livre est intéressant du point de vue de l’enquête dans laquelle l’héroïne nous transporte, car elle va remonter les indices afin de comprendre qui s’est passé. Mais il mérite aussi notre attention dans ce questionnement sur l’amour qui traverse le temps qu’il propose. Comment demeurer amoureux après tant d’années? Pendant la majorité du récit, Marie est étrangère à la vie qu’elle a mené durant douze années auprès de celui qu’elle aime. Elle découvre avec le lecteur, ce qui a composé ces années de mariage. Elle porte un regard neuf sur le déroulement des événements.
Au fil du livre, elle se questionne à savoir ce qui a pu être un événement si fort psychologiquement pour qu’elle aie préféré oublier ces années où elle a même donné la vie à trois enfants. Ce qui est si marquant pour une femme. Nous découvrons que c’est une crise conjugale qui l’a plongé dans cette amnésie. Pour sauver son amour, elle a préféré tout oublier pour revenir à sa rencontre première avec Pablo. Plus le récit avance, il devient inévitable que Pablo découvrira l’amnésie de sa femme. Et il essaiera de lui raviver la mémoire en vain. Un pan de leur vie commune a disparu. À la fin il lui dit:: “Nous n’avons aucun besoin d’habiter dans notre passé…Tu as perdu ton passé à mes côtés, je te promets aujourd’hui un avenir dont tu te souviendras longtemps.”
L’héroïne nous quitte en disant “Oublier, c’est aussi pardonner”. C’est donc pour lui pardonner qu’elle a préféré oublier jusqu’à plonger dans une amnésie irréversible. L’idée est séduisante. Combien d’entre nous voudraient oublier des passages difficiles de notre vie. Oublier les blessures que l’autre nous a, malgré lui, infligé.
Revenir à un amour purifié, où les fautes commises, les maladresses n’existent plus. Il n’y resterait que les bons moments. Mais est-ce vraiment cela l’amour?
Un amour est comme un visage qui s’imprègne de rides. Ce sont les moments de douleurs et de rires qui creusent les sillons sur nos fronts. Un amour sans souvenir, est-ce encore de l’amour? Un pardon sans mémoire, est-ce un véritable pardon? Le défi de l’amour, la grandeur de l’amour et du pardon, c’est justement de grandir “malgré” les offences! La cicatrice reste, mais l’amour est plus grand. S’il n’a pas oublié, il a pardonné, sachant l’autre, et se sachant capable de faire souffrir. Ce sont ces chemins escarpés tout comme ces beaux sentiers fabuleux qui construisent notre route à deux. Chaque pas compte, et que Dieu nous préserve d’oublier ces foulées bonnes et moins bonnes! L’amour , malgré les difficultés, restera. Il supporte tout,il fait confiance en tout,il espère tout, il endure tout. L’amour ne passera jamais.