Ste Thérèse d’Avila disait : « Le plus court chemin pour aller à Dieu, c’est la prière. Si l’on vous en montre un autre, on vous trompe ! » J’avais cette phrase en tête en pensant à l’article que je voulais rédiger. Mais comment parler de la prière du couple. Qu’en dire ? Comment ne pas prier quand on décide de se marier ? La vie à deux est un chemin que nous entreprenons guillerets. On s’aime, les oiseaux chantent dans les branches, le sentier est dégagé et il fait un temps magnifique. Marcher à deux c’est s’épauler pour traverser la vie ensemble et trouver Dieu au bout du voyage.
Mais la météo du couple est aussi imprévisible que celle du temps : prenez en tout temps votre parapluie de prières, averses fréquentes et inopinées ! Quel couple a un chemin sans embûche ? Chaque étape nous demande d’être soudés, de tenir bon dans l’adversité. Qui d’autre que Dieu peut nous souder autant contre vents et marées ? La prière devient alors une respiration, car il faut constamment nous abandonner entre les mains de Dieu, pour le boulot qu’on ne trouve pas, pour la fièvre du petit Hector, pour Jules, le grand, qui sort la nuit avec des copains peu fréquentables, pour l’enfant qui ne vient pas…La prière devient un refrain que l’on chante après chaque couplet de vie.
Pour la prière en couple, la forme et la durée importe peu. Mais il faut l’introduire dès que l’on peut. Pour bien des couples, ce sera avant de dormir, ne serait-ce que pour s’endormir réconciliés ou rassurés devant les épreuves. Ce peut être aussi au saut du lit pour s’imprégner de Dieu tout au long du jour.
La prière est vie. Elle ne prend forme que lorsqu’elle s’incarne dans la nôtre . Ce très beau texte de Ramuz qui figurait dans les livrets de famille du canton de Vaud rend bien compte de cette vie racontée telle une prière :
Viens te mettre à côté de moi, sur le banc, devant la maison, femme, il va y avoir 40 ans qu’on est ensemble. Ce soir, et puisqu’il fait si beau, et c’est aussi le soir de notre vie, tu as bien mérité, vois-tu, un petit moment de repos. Voilà que les enfants à cette heure sont casés et s’en sont allés par le monde, et de nouveau on n’est rien que les deux, comme quand on a commencé. Femme, tu te souviens, on avait rien pour commencer, tout était à faire, et on s’y est mis, mais c’est dur, il faut du courage, de la persévérance, il faut de l’amour et l’amour n’est pas ce qu’on croit quand on commence. Ce n’est pas seulement ces baisers qu’on échange, ces petits mots qu’on se glisse à l’oreille, ou bien de se tenir serrés l’un contre l’autre. Le temps de la vie est long, le jour des noces n’est qu’un jour, c’est ensuite, tu te rappelles, c’est seulement ensuite qu’a commencé la vie. Il faut faire, c’est défait. Il faut refaire, et c’est défait encore. Les enfants viennent, il faut les nourrir, les habiller, les élever, ça n’en finit plus. Il arrive aussi qu’ils soient malades; tu étais debout toute la nuit. Moi, je travaillais du matin au soir. Il y a des fois qu’on désespère et les années se suivent et on n’avance pas. Il semble souvent qu’on revient en arrière. Tu te souviens, femme, tous ces soucis, tous ces tracas. Seulement, tu as été là, on est resté fidèle l’un à l’autre, et ainsi, je m’appuyais sur toi, et toi, tu t’appuyais sur moi ; On a eu la chance d’être ensemble. On s’est mis tous les deux à la tâche, on a duré, on a tenu le coup. Le vrai amour n’est pas ce qu’on croit, le vrai amour n’est pas d’un jour, mais de toujours. C’est de s’aider, de se comprendre, et peu à peu, on voit que tout s’arrange. Les enfants sont devenus grands, ils ont bien tourné, on leur avait donné l’exemple. On a consolidé les assises de la maison, que toutes les maisons du pays soient solides et le pays sera solide, lui aussi. C’est pourquoi, mets-toi à côté de moi et puis regarde, car c’est le temps de la récolte, et le temps des engrangements. Quand il fait rose, comme ce soir, et une poussière rose monte partout entre les arbres, mets-toi tout contre moi, on ne parlera pas, on n’a plus besoin de rien se dire, on n’a besoin que d’être ensemble encore une fois, et de laisser venir la nuit dans le contentement de la tâche accomplie.