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Patristique

Discours 39 sur le Baptême du Seigneur

Imprimer Par Grégoire de Nazianze

Grégoire est né près de Nazianze, en Cappadoce. Il est, avec Basile de Césarée et Grégoire de Nysse, l’un des trois Cappadociens qui ont donné à la théologie orthodoxe, aussi bien orientale qu’occidentale, sa première systématisation et sa première formulation classique. Par rapport aux deux autres, et par rapport à tout son siècle, il se distingue par une sensibilité délicate, une finesse, un sens de l’intériorité qui l’apparente à certains modernes, comme Fénelon et Newman. Ses hésitations, ses repentirs, son goût de la solitude, ses épanchements lyriques, son besoin d’autojustification font de lui un romantique avant la lettre. Avec Grégoire de Nazianze, un certain type de vie chrétienne acquiert droit de cité dans la tradition religieuse : l’entretien secret de l’âme avec elle-même et avec Dieu. Son amitié profonde avec Basile de Césarée lui fait dire qu’ils sont « une seule âme dans deux corps ». Grégoire a été surnommé le « Démosthène chrétien ». Il restera toujours fidèle à l’idéal du « bien dire ». En vérité, la rhétorique de Grégoire de Nazianze est loin d’être une technique purement scolaire. Son esprit fin, délicat, original, avec une pointe d’ironie et de tendresse, se joue des procédés, les domine, avec un réel génie artistique. Il se manifeste souverainement dans ses deux cent quarante-cinq lettres, adressées pour la plupart à des amis, notamment à Basile de Césarée. Grégoire s’y révèle notamment un maître de l’ironie, mais sa caractéristique la plus profonde réside dans la délicatesse de sentiments d’une âme qui mêle harmonieusement l’idéal chrétien de l’amour mutuel et l’idéal antique de l’amitié partagée. Il est également fidèle, avec originalité, aux règles des genres littéraires dans sa production oratoire qui comprend des discours panégyriques, des discours funèbres (sur la mort de son père, de son frère, de sa sœur), des discours d’invective contre l’empereur Julien, d’apologie personnelle, des discours théologiques enfin, tenus à Constantinople pour défendre l’orthodoxie trinitaire. Il se distingue au Concile de Constantinople en 381 comme archevêque de la capitale de l’Empire byzantin où il défend robustement la divinité de l’Esprit Saint qui est alors proclamée solennellement. Mais déçu et blessé par les intrigues politico-religieuses qui se manifestent au Concile, il démissionne du Siège de Constantinople et se retire en Cappadoce pour y écrire des poèmes théologiques. Il meurt en 390. Tout comme son ami Basile de Césarée (décédé en 371), il est Docteur de l’Église.

Le Christ est illuminé par le baptême, resplendissons avec lui; il est plongé dans l’eau, descendons avec lui pour remonter avec lui. Jean est en train de baptiser, et Jésus s’approche; peut-être pour sanctifier celui qui va le baptiser; certainement pour ensevelir tout entier le vieil Adam au fond de l’eau. Mais avant cela et en vue de cela, il sanctifie le Jourdain. Et comme il est esprit et chair, il veut pouvoir initier par l’eau et par l’Esprit.

Le Baptiste n’accepte pas de le baptiser. Jésus insiste. Mais: C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi. Voilà comment la lampe s’adresse au soleil, la voix à la Parole, l’ami de l’Époux à l’Époux, le plus grand des enfants des femmes au premier-né de toute la création; celui qui avait bondi dans le sein de sa mère à celui qui avait été adoré dans le sein de la sienne, le précurseur présent et futur à celui qui vient d’apparaître et qui réapparaîtra. C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi. Que Jean ajoute donc: et en me sacrifiant pour toi. Il savait en effet qu’il recevrait le baptême du martyre ; ou, comme Pierre, que ses pieds ne seraient pas seuls purifiés. Mais voici Jésus qui remonte hors de l’eau. En effet, il porte le monde. Avec lui, il le fait monter; il voit les cieux se déchirer et s’ouvrir, alors qu’Adam les avait fermés pour lui et sa descendance, quand il fut expulsé du paradis que défendait l’épée de feu. Alors l’Esprit atteste sa divinité, car il accourt vers celui qui est de même nature. Une voix descend du ciel, pour rendre témoignage à celui qui en venait ; et, sous l’apparence d’une colombe, elle honore le corps, puisque Dieu, en se montrant sous une apparence corporelle, divinise aussi le corps. C’est ainsi que, bien des siècles auparavant, une colombe est venue annoncer la bonne nouvelle de la fin du déluge.

Pour nous, honorons aujourd’hui le baptême du Christ, et célébrons cette fête de façon irréprochable.

Soyez entièrement purifiés, et purifiez-vous encore. Car rien ne donne à Dieu autant de joie que le redressement et salut de l’homme: c’est à cela que tend tout ce discours tout ce mystère. Soyez comme des sources de lumière dans le monde, une force vitale pour les autres hommes. Comme des lumières parfaites secondant la grande Lumière, soyez initiés à la vie de lumière qui est au ciel ; soyez illuminés avec plus de clarté et d’éclat par la sainte Trinité, dont vous avez reçu maintenant, d’une façon restreinte, un seul rayon, venant de l’unique divinité, en Jésus Christ notre Seigneur, à qui appartiennent la gloire et la puissance pour les siècles des siècles. Amen.

Patristique

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