Ces jours-ci, je suis envahi par une scène de l’évangile de Jean: la mort et le retour de Lazare (11, 1-45). Ce récit me parle de la fin, de la mort.
La mort existe. Chacun d’entre nous va mourir un jour. Je ne sais pas comment vous vous situez par rapport à la fin de votre vie. Quand j’étais jeune, ce n’était pas une préoccupation pour moi. Avec les années, le poids des âges, la mort est devenue une réalité à envisager concrètement.
Comment nous comportons-nous en face de cette éventualité? Avez-vous peur de mourir? Je crois que personne n’échappe à cette peur. Un jour ou l’autre, elle nous taraude. À certains moments, elle nous paralyse. Pas surprenant que nos contemporains évitent le plus possible d’y penser et d’en parler. Nos salons funéraires nous reçoivent à pas feutrés pour atténuer nos angoisses.
Nous ne sommes pas les seuls à avoir peur. Même les apôtres, si proches de Jésus pourtant, ont peur de mourir comme ils ont peur que leur maître soit attrapé par la faucheuse. À l’idée de devoir aller à Béthanie rencontrer Lazare malade, à quelques pas de Jérusalem, les apôtres résistent: «Tout récemment, les Juifs cherchaient à te lapider, et tu retournes là-bas?» (Jean 11, 8). Devant la persistance de Jésus, Thomas se résigne: «Allons-y, nous aussi, pour mourir avec lui!» (Jean 11, 16).
Ce n’est pas la première fois que les apôtres ont peur. Rappelez-vous le voyage sur le lac un jour de tempête. Jésus avait été direct ce jour-là: «Pourquoi avez-vous peur, hommes de peu de foi?» (Matthieu 8, 26) Tout au long des évangiles, les apôtres sont constamment acculés à la foi contre la peur.
Jésus demande la foi à ceux qui ont peur. Cela ne signifie pas qu’il minimise la mort. Bien au contraire. Devant la famille de Lazare, puis devant le tombeau de son ami, Jésus est envahi par l’émotion. Il pleure même. Quand il sera lui-même à l’agonie, l’évangile dit qu’il ressent «tristesse et angoisse» (Matthieu 26, 37).
Dans la vie de Jésus comme dans la nôtre, la mort est bien présente. Et elle paraît en contradiction avec l’amour de Dieu. Devant la mort, on cherche Dieu, Dieu qui aime. On n’a pas toujours l’impression qu’il est présent. Marthe et Marie ne disent-elles pas à Jésus : «Seigneur, si tu avais été là , mon frère ne serait pas mort» (Jean 11, 21.32)?
Et pourtant, les évangiles nous montrent constamment Jésus en face de la mort, la sienne ou celle des autres. Le combat de Jésus est un combat contre la mort. Et ce combat est également celui de Dieu.
Devant le tombeau de Lazare, Jésus est en face non seulement de la mort de son ami, mais il se trouve devant sa propre mort. Il ira jusqu’au bout de lui-même, jusqu’au bout de sa vie. Et en réanimant Lazare, Jésus témoigne de sa confiance en Dieu, de sa confiance en la vie que Dieu donne.
La confiance de Jésus ne sera pas déçue. Dieu le ressuscitera . De la mort de Jésus surgira la vie. À Pâques, Dieu dit: «N’ayez pas peur! Désormais la mort est vaincue.»
Depuis la résurrection de Jésus, des hommes, des femmes, des enfants reçoivent le baptême pour que leur mort soit greffée sur la mort féconde du Christ. Depuis la résurrection du Christ, le combat humain est moins un combat contre la mort qu’un combat contre la peur, un combat en faveur de la foi en la résurrection. Suivre le Christ, c’est choisir le chemin de la confiance en Dieu, confiance en la vie plus forte que la mort, confiance en la mort porteuse d’avenir.