Comme tous les arts, le cinéma peut traiter autant de la réalité que de l’illusion. Pure coïncidence sans doute, plusieurs productions récentes font état du mince espace qui sépare parfois le rêve et la réalité chez certaines personnes. Nous retenons deux de ces productions et nous faisons une présentation sommaire de chacun.
LA SCIENCE DES RÊVES
Après avoir réalisé aux États-Unis l’étonnant ETERNAL SUNSHINE OF THE SPOTLESS MIND, Michel Gondry a tourné cette fois-ci dans sa France natale un film très personnel qui utilise avec aplomb une imagerie délirante et une animation à base de bricolage assez primaire.
À la mort de son père, Stéphane Miroux quitte le Mexique pour retrouver sa mère française qui lui a déniché un travail de maquettiste chez un éditeur de calendriers. Ce boulot déçoit le jeune illustrateur à l’esprit inventif. Toutefois, la rencontre avec Stéphanie, la voisine d’en face, le bouleverse. Comme lui, elle se passionne pour les objets bricolés. Notre inventeur en herbe entreprend alors de la séduire avec l’aide d’un collègue de travail fort débridé. Les obstacles sont nombreux surtout à cause de l’immaturité du jeune homme et de sa tendance à confondre souvent le rêve et la réalité.
Parsemé de réflexions sur le fonctionnement des rêves, le scénariste nous fait habilement passer du sommeil à l’état de veille. Devant une Charlotte Gainsbourg sympathique comme tout, l’acteur mexicain Gael Garcia Bernal fait preuve de candeur et de vivacité et Alain Chabat brille dans le rôle du collègue grossier.
L’ILLUSIONNISTE
S’inspirant de la nouvelle de Steven Millhauser, le réalisateur américain Neil Burger fait cohabiter dans son film des éléments de thriller politico-fantastique et de romance.
L’histoire se situe à la fin du 19e siècle et met en scène un certain Eisenheim qui se produit dans un théâtre de Vienne et séduit les foules par son talent extraordinaire d’illusionniste. À la fois sceptique et intrigué, Léopold, le prince héritier d’Autriche, assiste à un de ses spectacles, au cours duquel il incite sa fiancée, la duchesse Sophie von Teschen, à participer à un numéro de l’artiste. La jeune dame reconnaît alors en ce dernier un amour d’adolescence. Peu après, elle renoue avec lui, soulevant ainsi l’ire de Léopold. Celui-ci va jusqu’à demander à son inspecteur chef Uhl d’enquêter et de trouver un motif pour arrêter Eisenheim. Entre-temps, on découvre le corps inanimé de Sophie dans une rivière.
Pour recréer les numéros de magicien de l’époque, le réalisateur recourt avec efficacité à des effets infographiques. Toutefois, le cinéaste sait entretenir une ambiguïté soutenue quant aux dons surnaturels ou pas du héros. La magie opère, malgré quelques longueurs, grâce à une direction artistique très soignée. Edward Norton rend crédible son rôle de prestidigitateur et en limier royal, Paul Giamatti s’illustre dans un registre inhabituel. pour lui.