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Le psalmiste,

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Le psalmiste

Psaume 29 : « Adorez Dieu qui secoue avec force »

Imprimer Par Christian Eeckhout

1. Rapportez à Yahvé, fils de Dieu,
rapportez à Yahvé gloire et puissance,
2. rapportez à Yahvé la gloire de son nom,
adorez Yahvé dans son éclat de sainteté.

3. Voix de Yahvé sur les eaux, le Dieu de la gloire tonne ;
Yahvé sur les eaux innombrables,
4. voix de Yahvé dans la force, voix de Yahvé dans l’éclat ;

5. voix de Yahvé, elle fracasse les cèdres,
Yahvé fracasse les cèdres du Liban,
6. il fait bondir comme un veau le Liban,
et le Siryôn comme un bouvillon.

7. Voix de Yahvé, elle taille des éclairs de feu ;
8. voix de Yahvé, elle secoue le désert,
Yahvé secoue le désert de Cadès.
9. Voix de Yahvé, elle secoue les térébinthes,
elle dépouille les futaies.

Dans son palais tout crie : Gloire !
10. Yahvé a siégé pour le déluge,
il a siégé, Yahvé, en roi éternel.
11. Yahvé donne la puissance à son peuple,
Yahvé bénit son peuple dans la paix.
(© Bible de Jérusalem, Cerf 1998)

Commentaire

Voici probablement l´un des plus anciens textes poétiques du Psautier, ce que l’on remarque déjà par l’utilisation de la troisième personne dans cet hymne. Le psaume 29 (28) peut même provenir d’un poème pour Baal, transposé en prière à Yahvé (Boismard). Mais il fait bien partie du recueil des psaumes dits « de David » (Ps 3 – 41).

Ce psaume 29 est une prière de louange composée en trois temps : l’invitatoire appelle à l’offrande et à l’adoration de Dieu (versets 1-2) ; la prière continue en proclamant par sept fois l’action très impressionnante de la «voix de Yahvé » (versets 3 à 9). La finale s’achève en une formule de souhait et de bénédiction de Dieu pour son peuple (versets 10-11).

vv.1-2 : Le psalmiste parle quatre fois de « Yahvé » en ces 2 premiers versets (et dix-huit fois dans tout le psaume) : il met en évidence l’Existant, Celui qui est le transcendant par excellence, le principe et la fin.

Un appel est lancé aux liturges du culte céleste, dans une atmosphère de liesse. Ces « fils de Dieu » (littéralement, « des dieux ») doivent rendre gloire à Yahvé. Accorder une gloire du type céleste, c’est-à-dire exprimer la splendeur de Dieu, faire resplendir la renommée divine, apporter de l’éclat à « son nom », donc à tout son Être. Pour le peuple hébreu en exode, la gloire était le gage de la présence de Dieu, qui se révèle dans l’histoire par des actions qui nous surprennent (cf. le chant de victoire, Ex 15). Nous retrouvons encore cette glorification du nom divin révélé sur la terre, tant au buisson ardent pour Moïse (Ex 3,14-15), à Cana de Galilée pour ses disciples (Jn 2,11), à Béthanie pour Lazare et ses sœurs (Jn 11,40) que dans la prière de Jésus, en saint Jean (Jn 17,4-6). Saint Paul prescrit lui aussi d’agir pour cette gloire à tout moment (1 Co10,31) et et en donne l’exemple dans sa propre vie (1 Tim 1,17).

L’aboutissement de cette proclamation de la gloire est l’adoration qui revient à Dieu (cf. Ex 34,14), le seul saint. Jésus donnera son sens plénier à cette adoration, qui n’est pas un geste extérieur, mais qui exprime un mouvement intérieur de don de soi à Dieu, « en esprit et en vérité » (Jn 4,23).

vv. 3-9 : La deuxième partie du psaume 29 nous fait entrer dans un poème à dire à haute voix, comme si l’on était entré dans le mouvement d’une tempête. Des tempêtes, il y en a beaucoup dans la vie actuelle, sur tous les continents et jusque dans les familles. La tempête est parfois éloignée (v.3), parfois on la sent rapprochée (v.5), elle fond même quelquefois sur nous, dans nos déserts (v.7). Cette tempête fait résonner la voix de Dieu, amenée par un fort bruit de tonnerre.
Quand l’Ancien Testament utilise ce mot de « tonnerre », c’est pour exprimer « la voix de Dieu » (1 S 12,18 ; Jb 38,1). La version hébraïque utilise ici sept fois le terme « qol » pour signifier cette irruption de Dieu dans le monde. Habile psalmiste qui tire parti des ressources de la répétition pour élargir sa prière, sa proclamation de l’action divine. Le propos est de montrer que Dieu est maître de la création et très présent. Il fait autorité et juge avec équité.

Le psalmiste rappelle quatre éléments naturels puissants. D’abord les eaux (vv. 3-). Mais la forte voix de Yahvé tonne sur les eaux. Il domine le ciel d’où elles descendent jusque dans les profondeurs. Celles de la création bien sûr, mais encore celles qui permettent la libération en quittant l’Égypte (Ex 14,21). Depuis lors celles qui, tumultueuses, menacent la foi des disciples embarqués avec Jésus (Lc 8,23-24) : la tempête est apaisée !

Ensuite (vv.5-6) les grands arbres et les montagnes. Ces majestueux éléments terrestres ne peuvent résister à la voix de Yahvé. Les cèdres sont fracassés, l’orgueilleux est brisé. Les sommets enneigés du Liban ne tiennent plus en place et le mont Hermon – que les habitants du nord, à Sidon, nommaient le Siryôn – bondit comme un jeune animal. Voilà ce que produira la foi en Dieu pour celui qui prie comme Jésus (cf. Mc 11,23).

Les éclairs de feu (v.7) sont cet autre puissant élément naturel qui vient d’en haut et brille sur la terre. Ce pourquoi Job faisait l’éloge de la puissance et de la sagesse de Dieu (Jb 37,2-4).

Même le grand désert de Cadès au nord de l’Égypte (Ex 3,8 ; Nb 20,1) et les arbres solides qui s’y accrochent sont tordus, secoués ! (vv. 8-9a) Ainsi donc de l’Hermon jusqu’à Cadès, c’est-à-dire toute l’étendue de la Terre promise est décrite comme sous l’autorité de Sa voix. L’évangile de Jean notera, à son tour, que la voix céleste est quelquefois perçue par la foule comme un coup de tonnerre (Jn 12,28-29a). Cette voix du tonnerre nous réveille ou nous effraie, mais surtout nous appelle à Le reconnaître. Et si Dieu entend la voix de nos supplications comme l’affirme le psaume précédent (Ps 28,6), entendrons-nous Sa voix ?

Enfin (v. 9b) le résultat positif apparaît : « dans son palais tout crie : Gloire ! » et ainsi au ciel comme sur terre, une autre voix répond que Dieu brille au sein du devenir.

vv. 10-11 : Quant à la finale, nommant avec majesté le roi éternel qui trône, juge et bénit son peuple, elle fait un bel écho au début du psaume, car le peuple rejoint alors les fils de Dieu, ces Anges ou messagers, et le véritable Israël glorifiant Dieu, capables de louer Sa puissance avant d’en recevoir de Lui pour être heureux. La force ou la puissance n’est-elle pas un don du Saint-Esprit, pour progresser (cf. Is 40,29) ? La bénédiction et la paix en seront l’aboutissement (cf. Is 32,18). Le psalmiste nous les présente à juste titre comme des bienfaits espérés, toujours à espérer de Dieu.

Le Psaume 29 dans la liturgie

Dans la prière liturgique de l’Église le Ps 29 est chanté aux Laudes de la semaine I, pour nous mettre en éveil chaque premier lundi du mois et nous tenir dans une profonde attitude d’adoration. Si ce psaume sert même chaque année de psaume responsorial pour le dimanche du Baptême du Seigneur, c’est parce qu’il peut signifier que cette voix, Dieu l’a fait retentir au-dessus de Jésus, son Fils bien-aimé (Mc 1,11 ; Mt 3,17 ; Lc 3,22) aux eaux du Jourdain. Nous sommes dès lors invités à Le reconnaître comme son Temple plein de gloire (v. 9b). La paix de Jésus ressuscité nous est donnée, avec la force de son Esprit.

Saint Basile propose en outre : « Peut-être, et de façon encore plus mystique, (…) tu peux également comprendre par “tonnerre” ce changement qui s´accomplit à travers la grande “voix” de l´Évangile, après le baptême. » (Homélies sur les Psaumes: PG 30, 359).

En résumé :

Ce que le Psalmiste demande c’est un urgent retour à Dieu et il Le décrit comme Celui qui fait être, qui agit dans l’histoire. Le psalmiste célèbre les attributs majestueux de Dieu : sa splendeur et puis sa force qui secoue les éléments naturels des eaux et des montagnes, du feu, des forêts et des déserts. Si cette puissance du Créateur est manifestée dans la création visible et audible, la visite de Dieu implique un droit de jugement sur elle, comme au déluge. Mais elle permet également la bénédiction pour son peuple, aboutissant à la paix. Car Il s’occupe de nous, à sa manière, très personnellement.

Christian Eeckhout, o.p.

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