Il y a quelques années, juste avant la messe de la Pentecôte, le lecteur qui devait proclamer le récit tiré des Actes des apôtres me demande s’il peut omettre la liste des peuples à la fin où il est question de Parthes, de Mèdes, d’Élamites, de Cappadoce, etc. «Certains mots me sont si étranges que je trébuche à chaque fois que je les lis.»
Je lui réponds: «C’est bon que tu trébuches sur certains mots. Cela dit bien à quel point ces mots appartiennent à d’autres cultures que la tienne. Et du même coup, tu illustres bien le miracle de la Pentecôte. L’Évangile s’adresse à toutes les nations qui sont sous le ciel. Et même, il n’est pas nécessaire de parler une langue spéciale pour l’entendre. C’est dans chacune de nos langues que nous pouvons la recevoir. L’Église ne peut imposer une seule façon de dire l’événement de Pâques. Au contraire, elle s’efforce de proclamer Pâques dans toutes les langues et toutes les cultures de la terre. Les croyants n’ont pas à changer de patrie pour rencontrer le Christ; c’est le Christ lui-même qui adopte toutes les patries de la terre.»
La Pentecôte, c’est la fête de l’univers. C’est la fête d’un violent coup de vent qui secoue l’univers. L’Esprit de Dieu surgit et bouleverse tout. Nous sommes habitués aux bouleversements. La nature change à chaque saison. La science amène des transformations sans précédent. Les peuples et les civilisations se modifient de plus en plus rapidement.
L’Esprit de Dieu arrive dans ce monde en bouleversement comme un violent coup de vent. Une violence. L’Esprit conteste. Son action secoue les vieilles habitudes de haine et de guerre. Les puissants cherchent à dominer les faibles. L’Esprit parle de fraternité et de coopération. La mondialisation tend vers le nivellement par la pensée unique, le nivellement en imposant les lois du marché. L’Esprit veut faire entendre une parole qui déploie sa richesse parce que les cultures et les mentalités l’accueillent et l’expriment avec des accents différents. Spontanément, nous cherchons à nous regrouper selon nos affinités, selon nos intérêts personnels. L’Esprit construit une fraternité qui tient au delà de nos divergences et de nos oppositions.
L’Esprit Saint relève le défi que Dieu a lancé à l’humanité au début de l’univers quand il a fait l’homme et la femme profondément différents tout en leur demandant de s’attacher l’un à l’autre pour ne faire qu’un. L’homme et la femme sont appelés à l’unité tout en tenant mordicus à leurs différences. Quel défi! Et l’Esprit vient le réaliser non seulement chez les couples, mais aussi dans les sociétés, entre les races, entre les peuples.
On entend souvent dire que les religions suscitent les guerres et les conflits, qu’elles nourrissent les terrorismes. Parfois, je l’admets. Mais, fondamentalement, la plupart d’entre elles soutiennent une vision très heureuse de l’être humain. Par l’action de l’Esprit, le christianisme ne prône rien d’autre que l’amour, une invitation à construire des ponts plutôt que d’élever des barricades.