Une question, une réponse
Les foules ont interrogé Jean, elles disaient : Que devons-nous faire ? Jean leur répondait : Celui qui possède deux tuniques, qu’il partage avec celui qui n’en a pas. Celui qui a de la nourriture, qu’il en fasse autant. Des collecteurs d’impôts venaient aussi pour être baptisés. Ils lui demandaient : Maître, devons-nous faire ? Il disait : N’exigez rien de plus pour vous que ce qui est prescrit. Des soldats aussi l’ont interrogé : Et nous, que devons-nous faire ? Il leur répondait : Ne brutalisez personne, ne dénoncez personne pour de l’argent. Contentez-vous de vos gages. Le peuple était dans l’attente ; tous sondaient leur cœur à propos de Jean. Ils se demandaient : Ne serait-il pas le Christ ? Jean répondait à tous : Moi, je vous baptise par l’eau mais vient le plus puissant que moi ; je ne suffis pas pour délier la lanière de ses sandales. Lui vous immergera dans le souffle saint et le feu. Il tient dans sa main l’outil pour nettoyer son aire et rassembler le blé dans sa grange, mais la paille inutile il la consumera dans un feu qui ne s’éteint pas. Les appelant aussi à beaucoup d’autres choses, Jean apportait l’évangile au Peuple.
Commentaire :
Luc est l’évangéliste qui a le plus abondamment parlé de Jean-Baptiste. Tout le chapitre 3e de son évangile lui est consacré. Il serait difficile de considérer le passage proclamé ce dimanche sans le lier à l’ensemble. Le temps de Jean-Baptiste semblait de la plus haute importance pour Luc ; il précède vraiment le Christ, il vient avant lui comme celui qui prépare le chemin, lisions-nous dimanche dernier. Le précurseur avait la tâche d’orienter les disciples et tout Israël vers le Christ. Jésus lui-même devait lui rendre hommage : « En vérité, je vous le dis, parmi les enfants des hommes, il n’en a pas surgi de plus grand que Jean Baptiste ; cependant le plus petit dans le Royaume des Cieux est plus grand que lui » (Mt. 11 : 11). Jean demeure donc le type par excellence de tous les témoins de Jésus Christ et non moins de l’Église. Situé dans l’histoire profane (3 :4-6), par quelques exemples Jean Baptiste adresse aux foules et à tout le peuple l’appel à la conversion (3 : 10-14). Ce passage, écrit de la main de Luc, est dans la foulée de ce qui précède. Le sens pratique de cet appel est remarquable, des actes du quotidien et d’un milieu de vie bien concret en réponse à la question des foules : « Que ferons-nous ? » (3 : 10). Suit alors le discours de Jean sur le Messie. La sévérité du ton nous montre le message de salut tel qu’annoncé par les prophètes de l’Ancien Testament. Pour Jésus et ses apôtres, il deviendra : « Le Fils de l’homme n’est pas venu pour juger et condamner, mais pour sauver. »
CONVERSION
Au sens biblique du terme, le mot conversion implique des actes concrets, et pas seulement une manière de penser ou une bonne volonté. Même si tel est le début de toute conversion, il faut poser des actes. La foule en était bien consciente alors qu’elle demande : « Que devons-nous faire ? » La réponse du Baptiste est à retenir : il invite à la bonté et à la charité, et c’est tout à fait dans la ligne du Sermon sur la montagne (Lc. 6 : 29) ; il invitera les publicains à la justice dans leur profession et les soldats à ne pas avoir d’exigences excessives. Chez l’évangéliste Luc, ceci est à souligner, l’importance de l’action est constamment mise en valeur surtout dans le domaine social. À chacun d’agir de façon concrète à la place où il se trouve et en des formes diverses. Exigences d’une authentique conversion, ces conseils du précurseur si rigides paraissent-ils, n’ont pas encore la rigueur des exigences du Christ dans son Sermon sur la montagne, nous ne sommes pas encore dans un contexte de foi.
BAPTÊME
Pour entrer dans l’esprit du Sermon sur la montagne, le baptême d’eau ne suffit pas. Jean le donnait selon la tradition rituelle de l’Ancien Testament. L’eau était symbole de purification et s’y immerger était recommandé sinon obligé en diverses circonstances, particulièrement lors d’une conversion. Matthieu le précise (3 : 11) : le baptême d’eau en vue du repentir. Le baptême du « plus puissant que moi » sera dans l’Esprit saint et le Feu. Il serait risqué de soutenir ici que le feu doit s’entendre du feu de l’Esprit Saint. Ne faut-il pas plutôt connoter cette déclaration sur le baptême du Christ de la description du jugement qui lui fait suite. L’Esprit du Messie selon Isaïe (11 : 1 ) est l’Esprit du jugement que produit la crainte du Seigneur. Si le baptême d’eau produit la purification et scelle la conversion, l’autre baptême produit la sanctification et conditionne le jugement dont la description suit dans le texte (17). Jésus, le plus puissant qui vient, sera le Juge de la fin des temps.
JUGEMENT
Cette image du juge et du jugement demeure essentielle dans le Nouveau Testament. » : Le Père ne juge personne : tout le jugement, il l’a remis au Fils, afin que tous honorent le Fils comme ils honorent le Père. Qui n’honorent pas le Fils n’honore par le Père qui l’a envoyé. En vérité, je vous le dis, celui qui écoute ma Parole et croit en celui qui m’a envoyé a la vie éternelle, et n’est pas soumis au jugement, mais il est passé de la mort à la vie… Comme le Père dispose de la vie, ainsi a-t-il donné au Fils d’en disposer lui aussi et l’a constitué souverain juge parce qu’il est Fils de l’homme. » (Jn. 5 : 22-27) « Si quelqu’un entend mes paroles et ne les garde pas, ce n’est pas moi qui le condamnerai, car je ne suis pas venu pour condamner le monde, mais pour sauver le monde. Qui me rejette et ne reçoit pas mes paroles a son juge : la parole que j’ai fait entendre, voilà qui le jugera au dernier jour » (Jn. 12 : 47-48)
A la question posée de tout temps, voilà la réponse éternelle : la Parole fait chair « venue parmi les siens que les siens n’ont pas reçue ».