Lieu de la présence
La Pâque des Juifs approchait. Jésus monta à Jérusalem. Il trouva dans le Temple les marchands de bœufs, de brebis et de pigeons et les changeurs assis à leurs comptoirs. Se faisant un fouet de cordes, il les chassa tous du Temple, avec leurs brebis et leurs bœufs ; il dispersa la monnaie des changeurs, renversa leurs tables et dit au vendeurs de pigeons : « Ôtez cela d’ici, ne faites plus de la maison de mon Père, une maison de commerce ». Un mot de l’Écriture revint à la mémoire de ses disciples : Le zèle pour ta maison me dévora. Alors les Juifs intervinrent et lui dirent : « Quel signe nous montres-tu pour agir ainsi ? » Jésus leur répondit : « Détruisez ce sanctuaire ; en trois jours je le relèverai. » Les Juifs répliquèrent : « Il a fallu quarante six ans pour bâtir ce sanctuaire et toi, tu le relèveras en trois jours ? » Mais lui parlait du sanctuaire de son corps. Aussi, quand Jésus ressuscita d’entre les morts, ses disciples, au rappel de ce propos, crurent-ils à l’Écriture et à la parole qu’il avait dite.
Commentaire :
Pourquoi célébrer la dédicace de la basilique romaine Saint-Jean de Latran érigée au début du 4e siècle ? Cette église patriarcale constitue le siège (cathédra) épiscopal de Rome. Elle était regardée depuis toujours comme la « mère et la maîtresse » des églises. Érigée par Constantin, c’est en 313, à l’occasion du concile convoqué par le pape Miltiade pour condamner Donat et ses partisans. Comme on ne trouvait de lieu assez vaste pour accueillir les évêques d’Italie, d’Afrique, d’Orient et de Gaule, le pape sollicita l’hospitalité de l’impératrice dont le palais était sis sur la colline Coelius. Certains inspirés par sermon de saint Athanase d’Alexandrie. Donnent le 9 novembre 324 comme date de la dédicace par le pape Silvestre. Au 9e siècle, le Latran fut témoin du procès sacrilège intenté au pape Formose par son successeur, puis et détruit ou presque par un gigantesque tremblement de terre. L’anarchie régnait en maître au Latran, les ruines de la basilique étaient envahies par les mauvaises herbes et le silence avait repris ses droits : on ne célébrait plus d’offices dans la célèbre basilique. Mais ces épreuves ne purent effacer de l’histoire ecclésiastique la place de toute première importance qu’occupa toujours la basilique patriarcale du Latran. D’où la célébration de ce dimanche et l’actualité de l’évangile proclamée.
Sans doute, la foi de l’Église ne s’incarne point dans une construction matérielle, mais dans la vie des croyants : « Pierres vivantes …» ; mais la permanence n’est pas chose superflue ou désuète. L’église est comme la source de trois Temples spirituels reconnus par la Révélation, disons un seul Temple aux trois aspects complémentaires : le corps glorifié du Seigneur, l’Église et le chrétien, temple de l’Esprit saint.
CORPS GLORIFIÉ DU SEIGNEUR.
« Détruisez ce temple ; en trois jours de le relèverai ». Parole prophétique de Jésus prononcée la veille de sa mort et de sa résurrection. A la droite du Père, il sera l’homme parfait, lieu de toute gloire, dans une chair transfigurée. Là, dans cette chair transfigurée par la beauté et la grandeur de Dieu, retentit le chant de la création tout entière, des générations humaines et des événements de toutes les existences. En ce temple réside le secret non seulement de toute vie chrétienne mais de la création tout entière qui attend la révélation des enfants de Dieu.
L’ÉGLISE
« En lui, toute construction s’ajuste et grandit en un temple saint dans le Seigneur ; en lui, vous aussi, vous êtes intégrés à la construction pour devenir une demeure de Dieu, dans l’Esprit ». (Eph. 2 : 21) : le Christ, c’est l’Église appelée Temple, sanctuaire sacro-saint, sans tache ni rides ni rien de tel (Ep.5 : 27). Corps glorifié du Christ, l’assemblée de tous les rachetés constituent sinon une véritable identité, du moins une mutuelle convenance. Construit pour la gloire de Dieu, un temple n’en est pas moins consacré à l’usage des croyants, un peuple groupé, un ensemble sans cesse travaillé par les pasteurs, les missionnaires, les frères et sœurs oeuvrant sous toutes les latitudes, associés au Christ et mus par son Esprit. Ce Temple non-fait-de-main-d’homme exige le don et le travail de chacun. La main de Dieu cherche celle de l’homme pour achever l’œuvre et réaliser le Temple-église.
CHRÉTIEN, TEMPLE DE L’ ESPRIT.
« Approchez-vous de lui, la pierre vivante rejetée par les hommes, mais choisie, précieuse auprès de Dieu. Vous-même comme pierres vivantes, prêtez-vous à l’édification d’un édifice spirituel pour un sacerdoce saint, en vue d’offrir des sacrifices agréables à Dieu par Jésus Christ » (1 Pi. 2 : 4-6) Et l’apôtre Paul d’écrire : « Ne savez-vous pas que vous êtes un temple de Dieu, et que l’Esprit de Dieu habite en vous… Savez-vous que votre corps est un temple du Saint-Esprit, qui est en vous et que vous tenez de Dieu ? » (1 Co. 3 : 16 et 6 : 19 ) Pierres vivantes que nous sommes, chacune n’est pas seulement partie d’un tout, l’Église, mais chacune forme son propre monde, directement rattaché au mystère du Christ et en prise directe sur lui. Chacun de nous est temple, non seulement du fait qu’il appartient à l’Église entière, mais chacun dans l’enclos de sa personne est Temple, reposoir des personnes divines, amorce du corps ressuscité du Christ, mystère d’intimité.
CONCLUSION
Corps glorifié du Christ, Église totale, chrétien sanctifié, impossible de dissocier ces trois réalités. Le Temple signifie, célèbre et intègre le Christ, l’Église et les chrétiens. Le Temple évoque le mystère de la présence : Où qu’il soit érigé le Temple c’est Dieu présent, la création définit son lieu :« Un jour en tes parvis en vaut mille et j’ai choisi : le seuil de la maison de mon Dieu plutôt que la tente de l’impie » (Ps. 84 :1-6). Le Temple constitue de lieu de dialogue : un Dieu qui parle et à qui l’on parle ; lieu privilégié de colloque entre Dieu et l’homme. « Sois attentif à la prière et à la supplication que ton serviteur fait aujourd’hui devant toi ! Que tes yeux soient ouverts jour et nuit sur cette maison, le lieu dont tu as dit : « Mon nom sera là » Écoute la prière que ton serviteur fera en ce lieu. « 1 R. 8 :27-29).