Dans mon coin de planète, nous aimons particulièrement l’été. Avec son soleil, ses fleurs, ses oiseaux, ses vents doux et chauds.
Quand arrive la belle saison comme il nous plaît de l’appeler ici, les fenêtres s’ouvrent à pleine grandeur. Les portes s’entrebâillent. Les odeurs de vacances pénètrent dans toutes les pièces de la maison. Elles réveillent les chemises de coton à manches courtes, les bermudas, les sandales, les verres fumés. Les maillots de bain cherchent de l’eau. Les ballons et les bicyclettes se trémoussent de plaisir.
Tout ce décor se met à danser quand les enfants s’en mêlent aux derniers jours de juin. Finie l’école! Finis les devoirs! Finie l’étude! F-i-n-i avec ou sans s, avec ou sans e muet! Il n’y a plus de faute de grammaire pendant les prochains mois.
L’été devient la saison du bonheur à cause des vacances. Les vacances des enfants et les vacances des grandes personnes. Celles que nous prenons ou celles que nous rêvons.
Les autres saisons ont leurs charmes, mais elles sont marquées par une bien curieuse habitude: la course contre la montre! Nous courons du mois de septembre au mois de juin à essayer de récupérer du temps. Car, durant ces longs mois, le temps nous glisse entre les mains comme une couleuvre. Il en faudrait beaucoup plus pour tout réaliser ce que nous avons inscrit à notre agenda. Mais les heures nous échappent. Nous arrivons au soir épuisés, essoufflés d’avoir couru depuis le matin. Frustrés de ne pas avoir tout fait ce que nous avions projeté de faire. Avec cette désagréable sensation d’avoir butiné sans vraiment goûter au pollen de la vie. Nous «surfons» sur l’océan de nos jours sans le plaisir de plonger réellement en eux.
William Penn disait: «Le temps, c’est ce que nous désirons le plus mais hélas! c’est ce que nous utilisons le moins bien». C’est vrai. Il existe des cours sur la gestion du temps. Ces cours devraient être obligatoires de la naissance à la mort de tous les temporels. Pas seulement pour apprendre les lois d’une bonne organisation de nos journées ou pour découvrir des trucs pour mieux nous occuper. Mais aussi et surtout pour nous convaincre qu’il existe des temps qui n’ont pas besoin d’être rentables, productifs, payants…
Des temps pour chanter, des temps pour écouter le rire d’un enfant, des temps pour diriger son regard vers un coucher de soleil, des temps pour respirer une fleur, des temps pour cueillir des fruits sauvages, des temps pour suivre une fourmi le long d’un trottoir. Et des temps à perdre, à perdre, à perdre… pour le simple bonheur d’exister, d’être avec la personne que nous chérissons le plus au monde. Vivre en toute gratuité. Oublier la montre, le portefeuille, les dossiers, les outils et combien d’autres choses que nous ne parvenons pas à oublier le reste du temps.
Qohélet proclamait: «Je vois l’occupation que Dieu a donnée aux fils d’Adam pour qu’ils s’y occupent. Il fait toute chose belle en son temps; à leur coeur il donne même le sens de la durée sans que l’homme puisse découvrir l’oeuvre que fait Dieu depuis le début jusqu’à la fin.» (3, 10-11) C’est vrai que l’oeuvre de Dieu est trop vaste pour que nous puissions en faire le tour. C’est vrai aussi que nous avons un train de vie qui ne favorise pas la contemplation de cette oeuvre. Les vacances ne pourraient-elles pas nous convertir à des rythmes différents? Ne pourraient-elles pas nous apprendre à vivre autrement? Le vieux sage ajoute à propos de l’être humain: «Je sais qu’il n’y a rien de bon pour lui que de se réjouir et de se donner du bon temps durant sa vie. Et puis, tout homme qui mange et boit et goûte au bonheur en tout son travail, cela, c’est un don de Dieu.» (3, 12-13) Le temps gratuit, le temps perdu, le temps occupé à goûter au bonheur, n’est-ce pas le meilleur temps pour lever un coin du voile et pénétrer un peu dans le mystère des oeuvres de Dieu?
P.S. L’auteur de ce billet veut être cohérent avec ce qu’il vient de vous livrer. Il prend donc quelques semaines de congé. Il espère vous revenir – plus reposé! – au début d’août!