Cher Dieu,
C’est aujourd’hui la fête des pères, du moins au Canada. Je m’en voudrais de ne pas souligner l’événement. Surtout, je m’en voudrais de ne pas t’offrir mes voeux. Tu es, toi aussi, un père et tu l’es même de toute éternité. C’est ce que Jésus nous a révélé. À Marie-Madeleine, il a dit l’inouï: «Mon Dieu et votre Dieu! Mon Père et votre Père!» (Jean 20, 17) Qui aurait osé proclamer une telle foi? Nous en avons l’audace puisque tu es toi-même audacieux! Moïse l’a reconnu: «Est-il un dieu qui ait entrepris de se choisir une nation, de venir la prendre au milieu d’une autre, à travers des épreuves, des signes, des prodiges et des combats, par la force de sa main et la vigueur de son bras, et par des exploits terrifiants – comme tu as vu le Seigneur ton Dieu, le faire pour toi en Égypte – ?» (Deutéronome 4, 34) Tu es plein d’attention comme un père. Tu voles au secours de tes enfants quand tu vois la misère de ton peuple. Tendresse paternelle! Amour sans limite! Passion et compassion! Oui, Moïse avait bien raison de s’émerveiller: «D’un bout du monde à l’autre, est-il arrivé quelque chose d’aussi grand?» (4, 32)
Mais tu as fait davantage encore. Tu as fait de moi ton fils! Oui, ton fils! «Tous ceux qui se laissent conduire par l’Esprit de Dieu, dit saint Paul, ceux-là sont fils de Dieu.» (Romains 8, 14) Tu es Père. Tu es aussi Esprit, «un Esprit qui fait de [nous] des fils» (8, 15)! Et Paul d’oser à son tour: «Poussés par cet Esprit , nous crions vers le Père en l’appelant: ‘Abba!’» Est-ce toi qui t’abaisses ou est-ce nous qui sommes élevés pour que nous osions dire: «Papa! Papa chéri!»?
C’est toi qui t’abaisses, bien sûr. Tu prends l’initiative de te rapprocher et même de devenir l’un des nôtres. Tu t’es manifesté à nous comme un fils. De chair et de sang comme nous! Fils d’une femme, fils de l’une des nôtres, et Fils de Dieu! Si j’ose te reconnaître comme Père, je le dois à ce frère, «os de mes os et chair de ma chair» (Genèse 2, 23). Si je peux me considérer de ta famille, n’est-ce pas parce que tu t’es fait toi-même humain, et même plus humain que je ne puis l’être, plus intime à moi-même que je peux l’être à ma propre personne? C’est sans doute ce qu’a voulu dire ton Fils quand il a envoyé ses disciples vers les nations en disant: «Baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit» (Matthieu 28, 19) «Baptiser», ce qui veut dire «plonger, immerger, inonder». La traduction dit: «au nom du Père, et du Fils, et du Saint Esprit». Il faut lire plutôt: «Baptisez-les dans le nom, plongez-les dans le nom»! Baptisez-les dans le Père, le Fils et l’Esprit. Plongez-les dans la Trinité de Dieu! De tout bord et de tout côté, dans l’océan de Dieu! Comme dans une piscine, l’eau nous colle à la peau, ne laissant aucun espace entre notre corps et elle. Tu nous imbibes. Ce n’est plus nous qui vivons, c’est toi qui vis en nous!
C’est la fête des pères! C’est la fête de Dieu! C’est ta fête! De toi, j’ai reçu la vie, toute la vie, la vie qui me garde dans ta famille, qui me plonge même en elle. Le Fils a promis: «Moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à fin du monde!» Il l’est parce que je suis vivant de sa vie, parce qu’avec les autres croyants je forme son corps, parce que nous sommes vivants de ta vie de Dieu.
Dieu, bonne fête des pères! Les fils n’ont pas de fête des fils! Ils goûtent à celle des pères et cela leur suffit. Quand il s’agit de ta fête de père, la fête fait plus que nous suffire, elle nous comble! Merci infiniment!
Ton fils qui ne s’émerveillera jamais assez de son Père!