Le père Jacques Thierry, aumônier en milieu carcéral, livre dans cet ouvrage une réflexion nourrie des Écritures mais aussi très personnelle. Il écrit simplement pour témoigner de la manière dont s’articule son espérance au cœur d’un quotidien marqué par la rencontre avec des personnes souffrantes. Face aux situations de vie dramatiques des personnes qu’il accompagne, il cherche ce qui constitue l’essentiel de la foi et refuse de se payer de mots.
Dans la première partie du livre, l’auteur médite sur la relation entre Dieu et le malheur dans la Bible. On y découvre un Dieu compatissant qui écoute la plainte d’Hagar, la servante égyptienne, seule devant son fils mourant dans le désert. Mais combien de Hagar voient mourir leur fils sous leurs yeux? À ces personnes, le père Thierry refuse de dire qu’elles auraient dû prier davantage ou même que Dieu souffre avec elles. La foi et l’espérance ne nous évitent pas la souffrance. Mais à quoi bon croire, prier, espérer, si l’on continue quand même de boire jusqu’à la lie la coupe du malheur? Il est trop facile de donner au nom de Dieu des réponses gentillettes ou vertueuses quand on est soi-même épargné par la vie. Aux yeux de l’auteur, la révolte peut être prière autant que la louange. L’espérance est d’autant plus nécessaire qu’elle se vit à nu, comme un combat quotidien en solidarité avec des personnes blessées. «Il est hélas si facile et si naturel de réciter le Symbole des apôtres, de croire en la résurrection du Christ et de désespérer de tas de gens marginaux, déviants, de ne pas lutter contre les situations difficiles. (p.23) »
La deuxième partie du livre est consacrée à la prière. L’auteur se questionne sur la tendance actuelle à percevoir la prière comme un exercice d’hygiène mentale visant le bien-être. Cet utilitarisme passe à côté de la dimension transformatrice et relationnelle de la prière. Plus encore, la présence de Dieu à ma prière ne dépend pas des émotions agréables que la prière me fait vivre ou de la sérénité que j’en retire. Dieu n’est-il pas au rendez-vous aux heures où ma prière est douloureuse et plongée dans la noirceur? Pour l’auteur, prier, c’est se présenter en vérité devant Dieu, recevoir ses dons et oser lui donner des noms qui viennent du cœur et non des livres. C’est aimer plutôt que penser, affirme-t-il à la suite de Thérèse d’Avila.