Poète, écrivain et théologien juif, Schalom Ben-Chorin est né à Munich en 1913 et décédé à Jérusalem en 1999. Il avait émigré à Jérusalem en 1935 pour échapper aux nazis. Fin connaisseur de l’histoire comparée des religions, Ben-Chorin est un pionnier du dialogue entre juifs et chrétiens au XXe siècle.
Son livre sur Marie termine une trilogie dont le premier livre est consacré à Jésus et le deuxième à Paul. Ben-Chorin cherche à dresser un portrait historique crédible de ces trois personnages du Nouveau Testament, qu’il veut réintégrer dans la culture et la religion dont ils sont issus. Dans Mon frère Jésus, il a formulé une hypothèse qui a fait couler beaucoup d’encre: d’après lui, il est hautement probable que Jésus ait été marié.
Dans le dernier livre de sa trilogie, Ben-Chorin s’éloigne délibérément de l’image glorieuse et céleste de Marie avec laquelle les catholiques sont familiers. Il avoue d’entrée de jeu que l’on retrouve peu d’allusions à la mère de Jésus dans le Nouveau Testament. Le tout se limite à quelques versets des évangiles de Luc et de Jean, ainsi qu’au récit de la Pentecôte. La tradition chrétienne a extrapolé ses versets pour créer une théologie parallèle aux Écritures. Sans dénigrer cette tradition, Ben-Chorin essaie de s’en tenir le plus possible aux textes eux-mêmes.
Il met en évidence la grande distance que Jésus a pris avec sa famille, et en particulier avec sa mère. Cette dernière ne ressemblait-elle pas à toutes les mères juives dont la vie tout entière se déroulaient dans le giron familial, à l’écart de la vie publique, au rythme des traditions de leur peuple? Mère Myriam, simple juive orientale, ne s’est-elle pas sentie dépassée, voire malmenée, par ce fils qui a fait éclater les cadres traditionnels de la famille? La lecture attentive des évangiles remet en cause l’image idyllique et fusionnelle de la relation entre Marie et son fils. D’après Ben-Chorin, Marie ne se serait rapprochée du groupe des disciples qu’après la mort de Jésus, et en particulier lors de l’événement de la Pentecôte.
Ben-Chorin parle d’un point de vue juif. Toutefois, son intérêt pour le Nouveau Testament et son respect profond pour la foi des chrétiens ne se démentent pas. Le Jésus historique et les origines chrétiennes suscitent plus d’intérêt que jamais. Dans ce contexte, il est heureux que la trilogie de Ben-Chorin, écrite dans les années soixante, soit finalement traduite en français.